par Soeren Kern
- Certains ont indiqué que les barbelés contribuaient à dissuader les migrants illégaux et qu’en les supprimant, le gouvernement espagnol prenait le risque d’encourager de nouvelles vagues migratoires en provenance d’Afrique. D’autres ont aussi fait remarquer que l’Espagne cèdait le contrôle de sa frontière au Maroc, un pays avec lequel il a des relations tendues.
- Les barrières frontalières en question sont celles des enclaves espagnoles nord-africaines de Ceuta et Melilla – authentiques aimants pour Africains à la recherche d’une vie meilleure en Europe.
- La suppression des barbelés est conforme à la politique pro-immigration du gouvernement socialiste actuel.
- « Nous ne sommes pas contre l’immigration. Nous ne sommes même pas contre l’immigrant illégal. Ce n’est pas de leur faute si un gouvernement irresponsable les invite à venir ici illégalement ». – Iván Espinosa de los Monteros, porte-parole parlementaire du parti conservateur Vox.
Les autorités espagnoles ont commencé la dépose des barbelés le long de la frontière espagnole avec le Maroc. Le gouvernement socialiste a ordonné de retirer les barbelés après que les migrants qui tentaient de renter en Europe illégalement se soient blessés. Photo : la double clôture qui sépare l’enclave espagnole de Ceuta du Maroc, photographiée le 23 août 2018 (photo d’Alexander Koerner / Getty Images) |
Les autorités espagnoles ont commencé la dépose du fil de fer barbelé, connu sous le nom de « barbelé concertina », qui protégeait jusque-là leur frontière avec le Maroc. Le gouvernement socialiste espagnol a ordonné le retrait de ce barbelé extrêmement tranchant après que des migrants illégaux qui tentaient de franchir la frontière se soient blessés.
Le ministre espagnol de l’Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, a justifié la dépose du concertina côté espagnol par le fait que le Maroc a orné sa clôture frontalière de ce même barbelé concertina.
Certains observateurs ont fait remarquer que le barbelé tranchant est un moyen de dissuasion important contre l’immigration illégale et qu’en le supprimant, le gouvernement espagnol encourage les flux migratoires en provenance d’Afrique tout en abandonnant au Maroc – pays avec lequel l’Espagne a des relations tendues – le contrôle de leur frontière commune. Le Maroc débarque fréquemment des lots importants de migrants illégaux le long de la frontière espagnole dans le but de faire fléchir le gouvernement espagnol sur des dossiers qui n’ont rien à voir avec l’immigration.
Les barrières frontalières en question sont celles qui séparent du Maroc les enclaves espagnoles nord-africaines de Ceuta et Melilla – authentiques aimants pour les Africains à la recherche d’une vie meilleure en Europe.
À Ceuta, deux clôtures parallèles de six mètres de haut, surmontées chacune de fils de fer barbelé, courent sur près de huit kilomètres le long de la frontière avec le Maroc. À Melilla, des clôtures jumelles de quatre mètres de haut forment une frontière de près de 12 kilomètres de long. A Ceuta et Melilla les clôtures grillagées ont des mailles anti-escalade, et sont parsemées de caméras vidéo, de capteurs de bruit et de mouvement, ainsi que de projecteurs et de postes de surveillance.
Chaque année, des milliers de migrants – agissant souvent en groupes de plusieurs centaines de personnes – tentent, souvent avec succès, de franchir les clôtures de Ceuta et Melilla. Une fois en territoire espagnol, les migrants illégaux sont protégés par les lois magnanimes de l’Union européenne sur les droits de l’homme, lesquelles leur garantissent qu’ils ne seront jamais renvoyés dans leur pays d’origine.
Les migrants qui réussissent à franchir les clôtures de Ceuta et Melilla sont généralement transférés vers des structures de transit en Espagne continentale. Nombreux sont ceux qui n’y restent pas et continuent leur route en direction des pays plus riches de l’Europe du nord, où les prestations sociales sont plus généreuses qu’en Espagne. Clemen Nuñez, directeur de la Croix-Rouge de Ceuta, affirme que seuls 30% des migrants qui entrent à Ceuta restent en Espagne. Les autres se dirigent vers la Grande-Bretagne, la France et l’Allemagne. Les frontières de Ceuta et Melilla sont donc un problème qui touche aujourd’hui toute l’Europe.
Les migrants attaquent en masse les barrières frontalières dans le but de submerger la police des frontières. Au cours des 18 derniers mois, des milliers de migrants équipés de gants, de chaussures à crampons et de crochets de fortune ont escaladé les clôtures de Ceuta et Melilla, n’hésitant pas à faire preuve d’une extrême violence contre la police. Parmi les incidents récents les plus notables on signale :
- 26 juillet 2018. Au moins 800 migrants d’Afrique subsaharienne ont tenté d’escalader la clôture de Ceuta. Au total, 602 ont réussi à entrer en territoire espagnol. Les migrants ont utilisé une violence sans précédent blessant onze policiers espagnols à coup de chaux vive, de lance-flammes artisanaux, de bâtons et autres objets tranchants, sans oublier les jets d’urine et d’excréments.
- 22 août 2018. Profitant d’une fête musulmane et donc d’une moindre présence policière du côté marocain de la frontière, 119 migrants ont réussi à escalader la clôture de Ceuta.
- Octobre 2018. Plus de 300 migrants ont tenté de franchir la clôture de Melilla ; 200 d’entre eux, pour la plupart originaires d’Afrique subsaharienne, ont pénétré avec succès en territoire espagnol.
- 12 mai 2019. Plus de 100 migrants, principalement originaires du Cameroun, de Côte d’Ivoire et du Mali, ont tenté d’escalader la clôture de Melilla; 52 d’entre eux ont pénétré avec succès sur le territoire espagnol.
- 30 août 2019. Plus de 400 migrants ont tenté d’escalader la clôture à Ceuta; 155 d’entre eux, originaires d’Afrique subsaharienne, sont entrés avec succès en territoire espagnol.
- 19 septembre 2019. Au moins 60 migrants ont tenté d’escalader la clôture de Melilla; 26 d’entre eux, principalement originaires d’Afrique subsaharienne, ont réussi.
- 18 novembre 2019. Un camion transportant 52 migrants – 34 hommes, 16 femmes et deux enfants – a forcé le passage de la frontière à Ceuta. Le chauffeur, un Marocain de 38 ans résidant en France, a été arrêté à plus d’un kilomètre à l’intérieur du territoire espagnol. Les migrants, originaires du Congo, de Guinée et de Côte d’Ivoire, ont été emmenés dans un centre de transit à Ceuta.
Selon la Croix-Rouge espagnole, des centaines de migrants ont eu la chair lacérée et tranchée par les barbelés, ce qui a incité le gouvernement espagnol à les retirer.
Le 14 juin 2018, le ministre espagnol de l’Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, a promis de faire « tout son possible » pour enlever les barrières coupantes « anti-migrants ». Au micro d’Onda Cero, une radio espagnole, le ministre a déclaré qu’il avait commandé un rapport sur le « moyen le moins sanglant possible » de préserver la sécurité des frontières. « Je vais faire tout mon possible pour que ces barbelés coupants de Ceuta et Melilla soient supprimés », a-t-il déclaré. « C’est pour moi une priorité. »
Le 23 février 2019, en campagne électorale à Ceuta, Grande-Marlaska a réitéré sa promesse de retirer le barbelé concertina. Le même jour, il a visité la frontière côté marocain et a constatée qu’elle était ornée du même fil de fer barbelé. Les barbelés cisaillants du Maroc ont été financés par l’Union européenne à hauteur de 140 millions d’euros.
Le 26 août 2019, sur le plateau de la chaîne Télécinco, Grande-Marlaska, a de nouveau déclaré qu’il était déterminé à éliminer les « contrôles sanglants » aux frontières : « nous allons édifier les frontières du 21ème siècle, des frontières plus sûres, où les concept de sécurité et d’humanité ne sont nullement dissociés. »
Le 3 décembre 2019, le gouvernement a commencé à travailler sur un plan de 32 millions d’euros pour retirer les barbelés tranchants qui séparent Ceuta du Maroc. Ironiquement, ces rasoirs ont été installés en 2005 par le Premier ministre socialiste José Luis Rodríguez Zapatero – pour un coût de 28 millions d’euros.
Cette dépose des barbelés est conforme à la position pro-immigration du gouvernement socialiste actuel. En juin 2018, par exemple, le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez a accueilli 630 migrants que l’Aquarius avait secouru au large des côtes de la Libye. Matteo Salvini, ministre italien de l’Intérieur, qui avait refusé (avec Malte) d’accueillir l’Aquarius, a accusé à l’époque l’Espagne « de rendre l’immigration incontrôlable ».
En octobre 2017, la cour de Strasbourg a condamné l’Espagne à verser 10 000 € à deux migrants africains expulsés sommairement en août 2014, peu après qu’ils aient escaladé la clôture de Melilla. Le tribunal de l’UE a déclaré que la police des frontières espagnole n’avait pas vérifié l’identité des migrants et n’a pas favorisé leur accès à des avocats, des traducteurs ou du personnel médical. Le précédent gouvernement de centre-droit avait fait appel de cette décision, mais le nouveau gouvernement socialiste a déclaré qu’il réexaminerait cet appel et mettrait immédiatement fin aux expulsions express.
Le gouvernement espagnol a justifié la suppression des barbelés concertina au nom des droits de l’homme. Isabel Celaá porte-parole du gouvernement, a déclaré que « le gouvernement veut retirer les concertinas sans renoncer à la sécurité ». Elle a ajouté que « le contrôle des frontières doit être lié à la solidarité et au respect de la dignité humaine ». Celaá a insisté sur la possibilité « de sécuriser les frontières sans blesser personne ».
La police et les agents des patrouilles frontalières ont toutefois déclaré que la suppression des barbelés concertina rendra la frontière plus vulnérable encore aux incursions de masse. Ils ont ajouté qu’à chaque attaque massive, la police des frontières est submergée par les assaillants.
Si l’on en croit le journal ABC, les policiers, dans leurs conversations privées, estiment que le gouvernement socialiste de Madrid privilégie le bien-être des migrants avant la sécurité des forces de l’ordre. Ils ont noté que le 30 août dernier, aucun des 155 migrants qui ont franchi la frontière de Ceuta n’a été expulsé alors qu’ils avaient blessé onze policiers avec de l’acide et des matraques.
La police des frontières espagnole a déclaré à ABC que la fonction principale des barbelés tranchants n’est pas agressive, mais dissuasive :
« Les concertinas découragent nombre de personnes qui seraient tentées de sauter par-dessus la clôture. Quant à celles qui s’y risquent, individuellement ou en groupe, ces grillages tranchants ralentissent leur progression et permettent aux policiers de s’organiser. »
Le porte-parole du Parti populaire de centre-droit au Sénat, Ignacio Cosidó, a jugé la suppression des barbelés tranchants « parfaitement irresponsable ». « A mon avis », ce « geste » est un signal clair d’une politique espagnole de « frontières ouvertes » a-t-il ajouté.
Santiago Abascal, chef du parti conservateur Vox, troisième parti d’Espagne, a déclaré que le plan du gouvernement socialiste est partie prenante d’un effort plus large visant à saper la souveraineté nationale en faveur de la migration de masse mondialiste. Il a appelé à remplacer les clôtures par des murs en béton pour mieux sécuriser la frontière:
« Les frontières de Ceuta et Melilla sont violées en permanence par des hordes de migrants. Nous allons proposer une réforme qui permettra l’expulsion immédiate d’un migrant dont les papiers ne seraient pas en règle. Seul un mur de béton suffisamment haut donnera aux forces de sécurité les moyens de contrôler la frontière. »
S’inspirant du président américain Donald J. Trump, Abascal a déclaré que c’est au Maroc de payer le coût du nouveau mur : « C’est le Maroc qui ouvre les vannes de l’immigration clandestine pour faire chanter l’Union européenne. Il faudrait les faire payer pour cela. »
Le 12 septembre, le secrétaire général de Vox, Javier Ortega Smith, et le porte-parole parlementaire de Vox, Iván Espinosa de los Monteros, ont présenté un plan au Congrès espagnol pour remplacer les « clôtures et leurs barbelés inefficaces » par un mur en béton qui, en raison de son « épaisseur, de sa résistance et de sa hauteur » rendrait les « frontières de Ceuta et Melilla impénétrables et infranchissables ». Ce mur devrait être payé par l’Espagne avec une « aide économique » de l’Union européenne ont-ils ajouté.
Ortega Smith a déclaré que la proposition de construire un mur « n’a rien de démagogique » ; elle est nécessaire pour lutter contre l’immigration illégale. Il a expliqué que les clôtures actuelles sont inefficaces, que les migrants arrivent à les escalader et, qu’une fois au sommet, ils peuvent « jeter des pierres, de l’acide et de la chaux vive » sur la police des frontières qui les attend de l’autre côté. Ortega Smith a déclaré que les murs rendront inutiles les barbelés tranchants, une excuse que la gauche espagnole utilise pour dénoncer les traitements inhumains : « Nous ne voulons pas que les migrants soient coupés, nous préférons qu’ils ne puissent pas escaladent la clôture. »
Le porte-parole parlementaire de Vox, Iván Espinosa de los Monteros, a accusé le gouvernement socialiste d’encourager l’immigration de masse. « Nous ne sommes pas contre l’immigration », a-t-il déclaré à la télévision publique espagnole. « Nous ne sommes même pas contre les immigrants illégaux. Ce n’est pas de leur faute si un gouvernement irresponsable leur fait miroiter la possibilité d’entrer en Espagne illégalement. »
Soeren Kern est Senior Fellow du Gatestone Institute de New York.