Un documentaire de la BBC, diffusé mercredi 10 juillet au soir, a relancé les accusations d’antisémitisme au sein du Labour, principale formation de l’opposition au Royaume-Uni. De hauts responsables travaillistes y sont accusés d’ingérence dans la gestion des affaires d’antisémitisme alors que l’équipe chargée de gérer les conflits au sein du parti est censée fonctionner indépendamment des structures politiques du mouvement, y compris du bureau de son chef de file, Jeremy Corbyn.
Sam Matthews, ancien responsable de cette structure interne au Labour, a cependant expliqué aux équipes de l’émission « Panorama », qu’il avait considéré comme un « ordre » un courriel envoyé en mars 2018 par Seumas Milne, responsable de la communication de M. Corbyn, dans lequel celui-ci réclamait de revoir la manière dont les plaintes étaient traitées. La secrétaire générale du Parti travailliste, Jennie Formby, est aussi mise en cause pour ses interventions dans le processus disciplinaire.
Le Labour a nié toute ingérence et a reproché à la BBC son traitement « injuste » et « déséquilibré » du sujet. « Nous rejetons toute affirmation selon laquelle le parti est antisémite. Nous sommes solidaires du peuple juif et nous prenons des mesures décisives pour éliminer le cancer social de l’antisémitisme de notre mouvement et de notre société », a réagi mercredi soir le service de presse de la formation sur son compte Twitter et sur son site Internet.
Les accusations d’antisémitisme empoisonnent le Parti travailliste depuis plusieurs années, soulignant de profondes divisions entre ceux qui dénoncent la complaisance de Jeremy Corbyn à l’égard de ces faits et l’aile gauche, qui défend son chef.
Un parti « institutionnellement raciste envers les Juifs »
Pour son émission, la BBC a interrogé huit anciens responsables travaillistes, dont sept ont œuvré au sein du département chargé des plaintes et des conflits du parti. Le documentaire laisse aussi la parole à des membres du Labour de confession juive, qui témoignent des insultes qui leur ont été adressées.
Selon l’émission, plus d’un millier de plaintes pour antisémitisme s’accumulaient au printemps, mais seulement quinze personnes avaient été exclues. Interrogé à ce sujet, Andrew Gwynne, chargé des communautés au sein de la formation, a expliqué qu’il y avait « beaucoup d’affaires en cours » et que certaines personnes qui faisaient l’objet d’une enquête avaient choisi de quitter le parti de leur plein gré.
Réagissant mercredi soir, le Jewish Labour Movement (JLM), qui représente les adhérents juifs, a estimé qu’« après avoir vu ce programme, personne ne peut douter que le Parti travailliste soit institutionnellement raciste ». Le JLM a espéré que « des mesures soient prises », comme des suspensions ou des exclusions, envers ceux reconnus responsables d’actes répréhensibles.
Source www.lemonde.fr