En Belgique, les lieux qui représentent la communauté juive bénéficient d’une sécurité renforcée. D’autant plus depuis l’attentat du 24 mai 2014 contre le Musée juif de Bruxelles.
Nous sommes clairement une cible désignée et identifiable
Philou Ceciora est l’administrateur du Service social juif. Trente-cinq personnes travaillent au sein de son association. « S’il n’y avait pas les militaires et notre service de sécurité, le personnel et les membres de l’association ne viendraient pas ici« , assure-t-il. Et d’ajouter : « Ce n’est pas de la paranoïa, nous sommes clairement une cible désignée et identifiable« , constate-t-il.
La sécurité est l’élément central lors de toute discussion avec les membres de la communauté juive. Philou Ceciora avance d’ailleurs un chiffre : plus de 120.000 euros sont alloués chaque année au budget sécurité de son association. Il précise qu’en tant que directeur d’asbl, la première donnée qui entre en jeu lors de la préparation d’un événement, c’est la sécurité. « Avant même de demander si une salle est libre, nous évaluons les possibilités de sécurisation du lieu« , explique-t-il.
Menace accrue selon l’OCAM
Les intérêts juifs sont toujours placés en niveau 3 par l’OCAM, l ‘Organe de coordination pour l’analyse de la menace. Au lendemain de l’attentat contre le Musée juif, les institutions juives étaient en niveau 4, soit le niveau le plus élevé.
Aujourd’hui, du côté de l’OCAM, on rassure : « Nous n’avons aucune information qui indique une menace concrète. Par contre, on tient à l’œil plusieurs critères comme la propagande des organisations djihadistes, le contexte géopolitique et les antécédents historiques« , admet Paul Van Tigchelt, le directeur.
Ce sont ces éléments qui justifient que le niveau de menace vis-à-vis des intérêts juifs soit maintenu à 3 alors que le reste du pays est en niveau 2. Le risque est accru.
Les médias ne sont pas les bienvenus
Lors de ce reportage, nous avons pu remarquer la grande prudence des membres de la communauté juive. Nous avons essuyé plusieurs refus à nos demandes d’interview.
Ce fut notamment le cas de la part du gérant d’une épicerie spécialisée dans les produits casher : « Notre service de sécurité nous déconseille de vous répondre, parce que nous sommes à la vue de tout le monde, nous ne sommes pas protégés en permanence…« .
Nous n’avons pas le droit à l’erreur
Cette inquiétude est encore plus marquée autour des écoles. « La sécurité physique et psychologique de nos élèves est primordiale« , martèle un directeur.
Cette sécurité est assurée par des équipements de surveillance, par une présence militaire, mais aussi par la présence de services privés plutôt musclés. « Nous n’avons pas le droit à l’erreur, on parle de vie humaine« , souligne un autre directeur d’établissement scolaire.
À Anvers, la communauté ne veut pas rester cloîtrée
À Anvers, une importante communauté juive est installée. Elle est bien plus visible qu’à Bruxelles et ne vit pas cachée. Pour Daniel Werner, le porte-parole du Forum des organisations juives, la prudence fait cependant bien partie de la routine quotidienne : « Nous sommes toujours attentifs aux personnes suspectes, aux colis suspects, aux personnes qui entrent dans nos synagogues ou qui sortent de nos écoles. Nous sommes, en quelque sorte, entraînés à regarder autrement la réalité« , explique-t-il.
La communauté reste donc sur ses gardes, mais cela ne l’empêche pas non plus d’organiser de gros événements liés aux fêtes juives. « Il est évident que nous ne pouvons pas hypothéquer nos vies, mais des événements sont organisés, il y a souvent de beaux et gros événements dans la communauté juive à Anvers. À chaque fois sous surveillance policière, toujours avec nos services de sécurité, mais les événements sont certainement organisés et tout le monde y participe !« , se réjouit-il.
Reconnaissants envers l’État belge
Tant à Bruxelles qu’à Anvers, on souligne le soutien de l’État belge. « Nous sommes extrêmement reconnaissants vis-à-vis de la Belgique même si c’est un comble de devoir être placé sous protection dans son propre pays« , regrette Philou Ceciora du Service social juif.
À Anvers, Daniel Werner, le porte-parole du Forum des organisations juives, observe : « La moindre trace d’antisémitisme, verbale ou physique, est traitée de manière très concrète, très ferme« . Et cela rassure une communauté plutôt inquiète.
Une récente étude européenne a mis en lumière la montée de l’antisémitisme et sa conséquence directe : près de 42% des juifs belges ont songé à émigrer.
Source www.rtbf.be