Les rapatriés d’Algérie en France ressentent cette humiliation comme un nouveau coup de poignard porté dans le dos : les quinze membres de la délégation portée par l’association de sauvegarde des cimetières en Algérie présidée par l’infatigable avocat montpelliérain, Jacques Cavanna qui ont parcouru mille kilomètres pour la traditionnelle cérémonie de la Toussaint en Algérie ont fait une découverte consternante : les carrés juifs et chrétiens du cimetière d’Ain Milla ont été rasés par un promoteur local, à l’insu des autorités de la ville.
« Nous avons découvert ce scandale le 2 novembre. C’est une honte, un désastre, il n’y a aucun respect pour nos morts » fulmine Me Cavanna, joint ce vendredi par Métropolitain. L’avocat qui déplore que ce n’est pas le premier saccage volontaire dans des cimetières français en Algérie, révèle avoir écrit une longue lettre à Emmanuel Macron, en date du 6 novembre.
Aucune réponse du chef de l’État
Dans ce courrier recommandé avec accusé de réception, reçu par le cabinet du Président de la République, Jacques Cavanna s’interroge : « Quelles ont été les interventions du représentant de la France, et tout simplement celles de votre gouvernement pour éviter de tels actes ? ».
Dans sa lettre de trois pages, Jacques Cavanna demande à Emmanuel Macron, « Pourquoi il n’a toujours pas obtenu de réponse à un précédent courrier adressé à l’Élysée en date du 21 août dernier, sur la destruction ces derniers mois de tombes de Français dans des cimetières en Algérie ». La sauvegarde des cimetières français en Algérie constitue le cheval de bataille de l’association présidée par l’avocat de Montpellier.
Une fosse commune anonyme
Ce n’est pas la seule découverte faite par cette délégation qui s’est rendue début novembre en Algérie : ces rapatriés de France emmenés par Jacques Cavanna sont tombés sur une fosse commune anonyme contenant tous les ossements de toutes les tombes, dans le cimetière français de Bologhine. « Le gardien du cimetière qui s’est confié à nous a confirmé l’existence d’une opération de transfert des tombes vers une fosse commune », assure Me Cavanna, qui a informé Emmanuel Macron.
Dans sa lettre au Président de la République du 6 novembre, Me Cavanna pose ces questions, toujours sans réponse : « Est-ce que les familles titulaires à perpétuité de ces concessions dans ce cimetière de Bologhine, mais également dans d’autres cimetières, à Oran, Ain Taya ou encore à Birmandrais ? ».
« Attitude méprisante »
Dans sa longue missive au chef de l’État, le président de l’Association de la sauvegarde des cimetières français en Algérie dénonce, « l’attitude méprisante des autorités chargées de représenter la France dans ce pays : nous avons été choqués pour les cérémonies de la Toussaint, début novembre, par l’attitude de l’Ambassadeur de France en Algérie entouré des attachés militaire et culturel qui n’ont pas déposé une seule gerbe, couronne ou même une fleur fraîche. Notre délégation s’est déplacée avec quatre gerbes en hommage aux morts français en terre algérienne. Cela signifie que l’État Français n’a pas rendu hommage à ses morts sacrifiés en Algérie. Les familles trouvent cette attitude scandaleuse ».
Me Jacques Cavanna tient, par ailleurs à apporter à Emmanuel Macron, « une information que vous ignorez sans doute, comme beaucoup de ministres du gouvernement : tout a été fait volontairement pour que monument aux morts des Français à Alger soit caché du public. Et l’Ambassadeur de France à Alger et les autres personnalités ferment volontairement les yeux ».
C’est incontestablement un scud qui a atterri ces derniers jours sur le bureau du chef de l’État. À Montpellier, Me Cavanna, qui n’est pas prêt d’abandonner son combat et les familles qui se disent salies attendent une réaction d’Emmanuel Macron.
Ce vendredi, l’avocat montpelliérain insiste sur cette réalité : « Le problème ne vient pas des Algériens, ils nous aident dans nos démarches et se disent confus quand nos cimetières sont détruits, le problème vient de France. Il faut que M. Macron le comprenne bien ».
Ils veulent obtenir la nationalité française
Les Français de confession juive et chrétienne nés en Algérie durant la période coloniale réclament leur droit à la nationalité algérienne. Cette demande est réitérée par Me Jacques Cavanna, qui affirme que les Pieds-Noirs « ont le droit de prétendre à la nationalité algérienne puisqu’ils y sont nés et y ont vécu durant plusieurs générations. Nous sommes nés en Algérie et nous n’avons pas connu d’autres pays avant. Nous avons donc le droit à cette nationalité. Personnellement, je suis né à Alger et mon père était natif de Saïda (…). Je pense qu’il est de mon droit de demander la nationalité algérienne. Mais mon dossier n’est toujours pas traité par le ministère de la Justice ».
Plus de 60 % des pieds-noirs établis en France veulent obtenir la nationalité algérienne, comme Jacques Cavanna l’a encore rappelé au retour de son séjour à Alger pour la Toussaint. L’avocat révèle que Montpellier est devenue l’une des plus importantes villes ayant accueilli les Pieds-Noirs. Qui voient rouge avec ce nouveau saccage dans ce cimetière algérien.