« Moché redit ces paroles aux enfants d’Israël, mais ils ne l’écoutèrent point, ayant l’esprit oppressé par une dure servitude » (Chemoth/Exode 6,9).
Le Tiféreth Yonathan, de rav Yonathan Eïbeschüts, explique que Pharaon savait que c’est de la tribu de Lévi que viendrait le sauveur du peuple d’Israël. Cela contrariait les plans de Pharaon, qui visaient à asservir le peuple juif. Son discours face à ses conseillers nous a été transmis : « Voyez, la population des enfants d’Israël surpasse et domine la nôtre. Eh bien ! usons d’expédients contre elle ; autrement, elle s’accroîtra encore et alors, survienne une guerre, ils pourraient se joindre à nos ennemis, nous combattre et sortir de la province » (id. 1,8-9). Afin d’éviter qu’un membre de la tribu des Léviim n’en vienne à se lever et à entrainer le peuple à se révolter contre le pouvoir qui l’opprime, Pharaon prend une disposition surprenante : il exempte les membres de cette tribu de l’asservissement ! Il suivait un principe simple : une personne qui n’est pas plongée dans la difficulté n’est pas en mesure d’en sauver les autres. Seul « qui veille sur le figuier jouira de ses fruits » (Michlé/Proverbes 27,18).
Cette réalité humaine aurait du reste du empêcher l’Eternel effectivement de choisir l’un des membres de la tribu de Lévi pour enclencher la libération.
Pourquoi Lui-Même a-t-Il agi ainsi ?
Le Torath Or, un commentaire du Tiféreth Yonathan, explique : Moché avait un talent singulier – il était capable de ressentir totalement les soucis et les difficultés d’autrui ! Rachi écrit à son égard, plus haut (id. 2,11) : « Il voulait voir [leur situation] de ses propres yeux et mettre son cœur à être avec eux dans leur douleur. » Une telle capacité, rarement atteinte, permettait à Moché de prendre en main la libération du peuple d’Israël, grâce à son engagement à ses côtés. Il sortait ainsi du lot humain normal, ce que l’Eternel Seul savait apprécier, et de ce fait la défense de Pharaon fut réduite à néant.