Le président Emmanuel Macron, frappé par le syndrome de l’impopularité chronique tout l’été, a tenu à remobiliser ses troupes internes, lors du séminaire de rentrée du gouvernement lundi, et externes au cours de son discours de politique étrangère devant les ambassadeurs mardi.
Cette allocution, qui avait pour but de fixer le cap de la diplomatie française pour les cinq ans à venir, a donné le ton de la « doctrine Macron » à l’étranger, dont les axes se résument à trois mots : « sécurité, indépendance et influence ».
Après s’être posé en défenseur d’une France « reprenant sa place dans le monde et en Europe », boostant ainsi le moral des ambassadeurs, le président a étayé sa position sur les dossiers internationaux majeurs: crise migratoire, Sahel, terrorisme, conflit syrien, nucléaire iranien ou encore Venezuela.
La première priorité de la France est de lutter contre le « terrorisme islamiste », a lancé au tout début de son discours un président jusqu’ici peu habitué à utiliser cet adjectif revendiqué par la droite et l’extrême droite, comme s’il voulait marquer les esprits en nommant précisément le mal.
ludovic MARIN (AFP)
Après avoir salué l’intervention française au Mali décidée par François Hollande, « une décision qui a fait l’honneur de la France », selon ses mots, Emmanuel Macron n’a pas hésité à prendre ses distances avec son prédécesseur sur la Syrie.
Le chef d’Etat français a ouvertement revendiqué sur ce dossier « un changement de méthode », déplorant que le processus d’Astana conduit par les Iraniens, les Russes et les Turcs ait tenu la France à l’écart.
« En instaurant un dialogue exigeant (avec ces acteurs), nous avons pu faire avancer concrètement la situation », a-t-il déclaré, en référence notamment à sa rencontre avec le président russe Vladimir Poutine à Versailles.
Une position qui diverge de la ligne anti-Assad tenue par François Hollande jusqu’au bout contre Téhéran et Moscou, alliés de la première heure du dirigeant syrien.
Ce changement de stratégie risque par ailleurs de provoquer l’ire d’Israël, qui poursuit sa campagne diplomatique contre la République islamique et s’inquiète de la présence accrue du Hezbollah, milice terroriste soutenue par l’Iran, à sa frontière nord.
Stanislav FILIPPOV (AFP)
La politique d’Emmanuel Macron sur l’accord nucléaire iranien est également problématique pour Jérusalem qui s’efforce depuis deux ans d’enterrer l’accord conclu entre les 5 1 à Vienne. « Je veux ici confirmer très nettement l’attachement de la France à l’accord de Vienne qui nous permet d’établir une relation constructive et exigeante avec l’Iran », a dit Macron. Un cauchemar pour l’Etat hébreu dont l’objectif premier à l’international est d’isoler la République islamique, bailleur de fonds et fournisseur d’armes au Hezbollah et au Hamas.
Le dialogue avec Téhéran a aussi été prôné par le président français au sujet de la crise opposant le Qatar à ses voisins du Golfe, qui dure depuis le 4 juin. Là encore, il a jugé qu’il était « indispensable » de parler à chacun des acteurs. Il a aussi noté que la rivalité entre Riyad et Téhéran était centrale sur ce sujet et expliqué avoir un « dialogue étroit, autant avec la Jordanie, l’Egypte et les pays du Golfe, qu’avec l’Irak ET l’Iran », de quoi ravir toujours plus les dirigeants israéliens.
Et si le conflit israélo-palestinien semblait être tombé aux oubliettes au vu de son évocation tardive dans le discours, Emmanuel Macron a estimé « fondamental » que la France continue à peser sur cette question.
Il a d’ailleurs annoncé une visite au printemps au Proche-Orient qui le mènera au Liban, en Jordanie, en Israël et dans les Territoires, un rendez-vous qui devrait permettre à Israël de mettre en garde Paris contre la menace iranienne.
Marion Bernard est journaliste, rédactrice en chef du site internet d’i24NEWS en français (@marionbernard28)