Islamisation: Erdogan construit un réseau de partis politiques à sa main en Europe

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  • La chose remarquable à propos du Parti égalité et justice (PEJ), le nouveau parti musulman en France, est qu’il est partie intégrante d’un réseau de partis politiques que le président turc Erdogan et l’AKP construisent pour influencer chaque pays d’Europe et influencer l’Europe au travers de sa population musulmane.
  • Quel est leur programme ? Rien que du classique pour un parti islamique : abolir la loi sur la laïcité qui, depuis 1905, établit la séparation de l’église et de l’État ; liberté pour les écolières de se voiler à l’école ; et la solidarité communautaire (par opposition aux droits individuels) en tant que priorité. Le tout enveloppé dans le drapeau pas si innocent de la « lutte contre l’islamophobie », un concept inventé pour clore le bec des critiques de l’islam.
  • « Le but [d’un parti islamiste] est le monde, pas un mandat. Sa mécanique est déjà rodée dans nos pays au sud : il prend le pouvoir au nom de la démocratie, puis suspend la démocratie par usage du pouvoir. Au mieux. Au pis, il opte pour la démarche du crabe qui garde ses pinces derrière son dos : pas d’ambitions politiques affichées, mais une ambition millénaire dans la tête : convertir les habits, les corps, les liens, les arts, les crèches, les écoles, les chants, la culture, puis attendre que le fruit tombe dans le creux du turban… Un parti islamiste est un piège ouvert … Si on le refuse, on bascule soi-même dans la dictature, mais si on l’accepte, on s’y soumet… » – Kamel Daoud, écrivain algérien, Le Point, 2015.

La mécanique des élections législatives commencée le 11 juin est en cours, les premiers résultats tombent. Une affaire qui roule ? Pas vraiment !
Mais la nouveauté du PEJ tient au fait qu’il fait partie d’un réseau de partis politiques construit par le président de Trukey, Recep Tayyip Erdogan et son Parti de la justice et du développement (AKP). Le but de ce réseau est d’influencer chaque pays d’Europe et d’influencer l’Europe à travers sa population musulmane.Un nouveau parti musulman a surgi dans le spectre politique français : le Parti Egalité Justice (PEJ). Ce n’est pas la première fois qu’un parti musulman se crée dans l’Hexagone. « Français et Musulmans » proche de L’Union des Organisations Islamiques de France (UOIF), elle-même émanation des Frères musulmans, en est un autre.

PEJ : un parti Pro-Erdogan en France

Le PEJ a été créé en 2015 à Strasbourg et présente 68 candidats. Pas assez pour couvrir tout le territoire, mais assez pour être représenté efficacement dans les circonscriptions où les populations turques et musulmanes sont fortement représentées. On estime que les citoyens français d’origine turque représentent 600 000 personnes en France, sur une population musulmane de 5 à 15 millions, selon des statistiques officieuses, les statistiques officielles n’existant pas.

Le PEJ est le premier parti en France établi par les Turcs. Le PEJ a déjà participé aux élections départementales de mars 2015, mais a été éliminé au premier tour. Selon le magazine Marianne : « le Parti égalité justice est étroitement lié au Conseil pour la justice, l’égalité et la paix (Cojep), une ONG internationale qui constitue, partout où elle s’implante, le relais de l’AKP », le parti du président turc Recep Tayip Erdogan. Selon L’Express, « de nombreux gestionnaires de PEJ occupent des fonctions de responsabilité dans le Cojep ».

Quel est leur programme ? Tout ce qu’il y a de plus classique pour un parti islamiste : abolir la loi de 1905 qui fonde la séparation de l’Église et de l’Etat ; autorisation de porter le voile pour les écolières dans les écoles publiques; nourriture halal dans les écoles ; soutien aux Palestiniens; solidarité communautaire (par opposition aux droits individuels)…. Le tout est enveloppé dans le drapeau de la « lutte contre l’islamophobie », un concept inventé pour taxer de racisme et clore le bec de tous ceux qui pourraient être tentés de critiquer l’islam.

Selon Marianne, Mine Gunbay, responsable des droits de la femme au conseil municipal de Strasbourg, a dénoncé sans crainte et sans relâche la métamorphose de Strasbourg en « laboratoire politique de l’AKP ». Strasbourg est la ville où Erdogan a été autorisé par l’ancien président Hollande à faire campagne en octobre 2015. En toute légalité.

Une autre initiative turque remarquable est la probable nomination en France d’Ahmet Ogras, représentant de l’Islam turc en France, à la présidence du Conseil français du culte musulman (CFCM). Ahmet Ogras est connu pour sa bonne relation avec le parti AKP d’Erodgan. Le CFCM est la structure juridique construite par le gouvernement français pour tenter d’avoir un interlocuteur unique pour tout ce qui concerne l’islam en France. Jusqu’à présent, tous les présidents du CFCM étaient d’origine algérienne ou marocaine.

Autriche

En Autriche, en 2016, des « citoyens turcs » ont fondé le parti Nouveau mouvement pour l’avenir (NBZ) pour donner aux Turcs une voix en politique. Le président de NBZ, Adnan Dinçer, a expliqué que la montée des partis extrémistes de droite avait amené les Turcs résidant en Autriche à travailler plus rapidement. « Les acteurs politiques prennent des décisions concernant les minorités qui travaillent ici, mais nous ne sommes pas impliqués dans ce mécanisme décisionnel », a-t-il déclaré. La NBZ affiche clairement son soutien au controversé président turc Recep Tayyip Erdogan et a condamné le « mouvement Gülen », que le gouvernement turc a accusé avoir fomenté un coup d’Etat en juillet 2016.

Pays-Bas

Denk, un parti fondé par Tunahan Kuzu et Selçuk Öztürk en mars 2017, est devenu le premier parti minoritaire ethnique à entrer au parlement néerlandais. Le parti, apparemment un porte-parole du président turc Erdogan, a remporté trois sièges aux dernières élections.

Le chef du parti, Tunahan Kuzu, a déclaré : « C’est le début d’un nouveau chapitre de notre histoire. Les nouveaux Pays-Bas se sont exprimés à la Chambre ».

Bulgarie

La population musulmane de la Bulgarie est composée de Turcs (sunnites), de chiites bulgares et de Roms, qui représentent ensemble 7-8% de la population totale. La Bulgarie compte trois partis politiques musulmans tous composés de turcs.

L’un de ces partis est le Mouvement pour les droits et libertés (HÖH), fondé en 1990 par Ahmet Doğan. En 2014, HÖH était représenté par 38 personnes au Parlement (15%) et avait quatre députés au Parlement européen (PE).

HÖH allié au Parti socialiste bulgare (BSP) et a son mot à dire dans la gestion du pays, même si son leadership a changé après que Doğan ait subi une tentative d’assassinat en 2013.

Mécontent de HÖH, Erdogan a travaillé à créer d’autres partis pro-turcs en Bulgarie.

Allemagne

De nombreux Allemands d’ascendance turque se sont investis dans les partis politiques ayant déjà pignon sur rue en Allemagne. Mais d’autres ont entrepris d’influencer la politique de l’extérieur.

L’ Allianz Deutscher Demokraten (« Alliance des démocrates allemands», ADD) est un petit parti fondé par Remzi Aru, en réaction à la reconnaissance par le Parlement allemand du génocide arménien.

ADD est amical envers Erdogan et a tenté d’établir une base électorale au sein des communautés immigrantes et musulmanes. Ses dirigeants semblent avoir eu des difficultés à collecter les 1000 signatures nécessaires pour participer aux élections de mai 2017 en Rhénanie-du-Nord-Westphalie.

Un autre parti musulman-allemand est le Bündnis für Innovation und Gerechtigkeit (« Alliance pour l’innovation et la justice », BIG), qui existe depuis 2010, mais sans beaucoup de succès.

La loi allemande interdit le financement étranger des partis politiques et un parti des Turcs aura à remplir un certain nombre d’obligations pour officier en tant que tel.

Le piège islamiste

Un parti islamiste dans une démocratie est, selon l’écrivain algérien, Kamel Daoud, « un piège ». Dans une tribune publiée par Le Point en 2015, il écrit:

« Un parti islamique en France ? Objet politique fascinant : on ne peut pas le refuser, mais on ne peut pas l’accepter. Rien ne résume mieux le piège français pour l’étranger du Sud : que vont-ils faire, ces Français ? Si la France dit oui, elle se soumet, sur le long terme. Un parti islamique est un parti islamiste par pente naturelle. Par définition. Son but est le monde, pas un mandat. Sa mécanique est déjà rodée dans nos pays au sud : il prend le pouvoir au nom de la démocratie, puis suspend la démocratie par usage du pouvoir. Au mieux. Au pis, il opte pour la démarche du crabe qui garde ses pinces derrière son dos : pas d’ambitions politiques affichées, mais une ambition millénaire dans la tête : convertir les habits, les corps, les liens, les arts, les crèches, les écoles, les chants, la culture, puis attendre que le fruit tombe dans le creux du turban. C’est la démarche horizontale, doctrine des colombes dans cette aire-là. Un parti islamiste est un piège ouvert : on ne peut pas le refuser au nom de la démocratie et c’est la démocratie qui le paiera en premier si on l’accepte. Si on le refuse, on bascule soi-même dans la dictature, mais si on l’accepte, on s’y soumet.

« Dès qu’il fait irruption sur une scène politique, il provoque les mêmes conséquences qu’en Algérie, en Égypte, au Pakistan, au Sahel ou en Tunisie : il divise le pays entre éradicateurs (ceux qui veulent éradiquer les islamistes) et réconciliateurs (ceux qui prônent le dialogue avec le monologue des islamistes) et fatalistes (ceux qui attendent que cela passe). ».

Fin analyste politique, Kamel Daoud sait – et tout le monde sait – que personne en France n’a LA solution pour affronter le problème islamiste. La seule question est : qui va gagner ? Réconciliateurs ou Eradicateurs ? Une chose est sûre pour l’instant, les réconciliateurs sont au pouvoir pour les cinq prochaines années.

La première femme voilée élue membre du Parlement déclenchera une crise de civilisation qui n’a sans doute pas d’équivalent dans l’histoire de la France.

Yves Mamou, basée en France, a travaillé pendant deux décennies en tant que journaliste pour Le Monde. Suivez Yves Mamou sur Facebook.

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