Non, Trump n’a pas entravé la justice ni rien fait d’illégal

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Selon le célèbre avocat constitutionnel Alan Dershowitz, le licenciement du directeur du FBI par Trump est parfaitement légal.

Non seulement Dershowitz connaît le droit, mais il est loin d’être un supporter de Trump ! De son côté Goodwin appuie toujours le Président, mais pense que des maladresses ont été commises par la Maison-Blanche dans cette affaire.

Pour les lecteurs de Dreuz, j’ai traduit ces deux textes.

Non, le président Trump n’a pas entravé la justice
Par Alan M. Dershowitz*

(publié le 11 mai 2017 sur le site du Gatestone Institute)

« Un argument dangereux est maintenant avancé par certains idéologues démocrates : à savoir que le président Trump devrait être inculpé pour le crime d’entrave à la justice parce qu’il a licencié James Comey, directeur du FBI.

Peu importe ce que l’on peut penser de la décision du Président de licencier Comey en tant que question politique, il n’y a pas de base légale pour conclure que le Président a commis un crime en exerçant son autorité statutaire et constitutionnelle pour licencier le directeur Comey.

Comme Comey l’a lui-même écrit dans sa lettre au FBI, personne ne devrait douter de l’autorité du président de licencier le directeur pour quelque raison que ce soit ou même sans raison.

Ce ne devrait pas être un crime pour un fonctionnaire public, que ce soit le président ou quelqu’un d’autre, d’exercer son autorité statutaire et constitutionnelle d’embaucher ou de licencier un autre fonctionnaire public.

Pour que quelque chose soit un crime, il doit y avoir un « actus reus » et un « mens rea », c’est-à-dire un acte criminel accompagné d’un état d’esprit criminel.

Un tel précédent pourrait être utilisé à l’avenir pour réduire les libertés de tous les Américains

Même en supposant que le président Trump ait été motivé de manière inappropriée pour licencier Comey, le motif seul ne devrait jamais constituer un crime. (…) Il est dangereux et faux de criminaliser les comportements légaux parce que cela peut avoir été motivé par de mauvaises pensées. Les gens qui s’intéressent aux règles de droit, peu importe leur sentiment au sujet du président Trump, ne devraient pas préconiser l’élargissement de l’entrave à la justice pour inclure l’acte présidentiel légitime de licencier le directeur du FBI. Un tel précédent pourrait être utilisé à l’avenir pour réduire les libertés de tous les Américains.

Alors, mettons ces bêtises derrière nous et ne criminalisons pas les différents politiques, comme ont essayé de le faire les extrémistes des deux parties. Les partisans républicains et démocratiques recourent souvent au droit pénal comme moyen de diaboliser leurs ennemis politiques. « Lock her up », était le cri de partisans républicains contre Hillary Clinton concernant sa mauvaise utilisation de son serveur de messagerie. Maintenant, « l’entrave à la justice » est l’équivalent du « lock-up », un cri de Démocrates partisans qui ne sont pas d’accord avec la décision du président Trump de renvoyer Comey.

Je me suis opposé à la criminalisation des différents politiques lorsque le gouverneur du Texas, Rick Perry, le député Tom Delay et le sénateur Bob Menendez ont été inculpés, et je m’oppose fermement à l’enquête actuellement menée contre le Premier ministre Netanyahou.

Le droit pénal devrait être utilisé en dernier ressort contre les élus, non pas comme la salve d’ouverture d’un combat politique. Il n’y a pas de place dans une démocratie pour les lois élastiques qui peuvent être étirées pour s’adapter à une conduite légitime avec laquelle les opposants politiques ne sont pas d’accord. Si vous permettez qu’elles soient étirées aujourd’hui pour accuser vos ennemis, demain elles pourraient être utilisées contre vos amis.

(…)

Il y a plus que suffisamment de raisons de débattre des mérites et des démérites des actions du président sans encore brouiller les pistes en se servant d’accusations de criminalité politiquement motivées.

La partisanerie ne semble avoir aucune limite ces jours-ci. Les deux partis en sont également responsables, tout comme les extrémistes du public et des médias. Il devient de plus en plus difficile d’avoir un débat nuancé sur des questions politiques complexes.

(…)

Les actions méritent soit un acte d’accusation criminelle, soit le prix Nobel. Personne ne bénéficie de ce type de combat idéologique. Acceptons donc d’être en désaccord sur des questions importantes, mais ne gênons pas le débat avec des slogans extrémistes comme « lock-up » ou l’« entrave à la justice ».

Nous valons mieux que cela.

 

Michael Goodwin du New York Post appuie Trump, mais le trouve agaçant

« Il n’y a pas si longtemps, une amie me faisait part des choses qu’elle devait faire avant de célébrer la Pâque (juive) avec sa famille : préparer les aliments rituels, faire quelque chose de spécial pour ses petits-enfants et faire de la place aux beaux-parents de sa fille.

Épuisée par la liste, elle m’a regardé et m’a dit : “Ce n’est pas facile d’être juif”.

Je connais ce sentiment. Je suis un partisan de Donald Trump. Le président rend rarement la tâche facile à ses supporters et teste souvent sa tribu par des mots et des gestes improvisés.

Même dans ses meilleurs jours, il parvient à ajouter une difficulté ou deux, ou dix.

L’affaire James Comey en est l’exemple parfait. Sur le fond, Trump a pris une excellente décision. Comey devait partir, à cause de ses erreurs concernant l’affaire Hillary Clinton. Et il en a commis beaucoup d’autres.

Pourtant, il ne suffit pas d’être juste à Washington, et pour Trump la barre a été élevée de façon exponentielle. La gauche démocratique et les médias (oui, je sais, c’est redondant) se lèvent le matin prêts à se ruer sur lui.

Ils n’ont pas besoin de faits pour libérer leur haine viscérale. Une rumeur juteuse et une source anonyme suffisent.

N’importe quelle erreur est commise et ils sont prêts à cracher une mise en accusation et à demander sa destitution.

Quelques fois, on sent que Trump comprend le niveau de difficulté, notamment lors de son interview avec l’agence Reuters concernant ses 100 premiers jours, lorsqu’il a dit : “Je pensais que ce serait plus facile”.

D’autres fois, il fait tout à l’envers, rendant difficile pour ses partisans de le défendre et facile pour les adversaires de l’attaquer. Ce n’est pas seulement ennuyeux.

Cette situation exaspérante a été et reste la menace existentielle qui pèse sur la présidence de Trump, compte tenu de sa précarité publique et de la marge étroite de son parti au Congrès.

Il ne sera pas en mesure de respecter ses promesses de revitaliser l’économie et de reconstruire l’armée à moins d’obtenir un soutien plus large pour son programme et d’amener les gens à avoir davantage confiance en son jugement.

Cette obligation s’applique autant aux politiciens qu’aux citoyens ordinaires. Tous ont besoin d’être réconfortés à l’effet qu’il est réellement à la hauteur de la tâche.

Le tumulte causé par l’affaire Comey prouve également autre chose : une bonne idée, surtout une grande idée, exige une bonne exécution.

L’annonce ratée a eu pour effet de saper la logique audacieuse de la décision, et la réaction de la Maison-Blanche aux réactions est un exemple classique de comment empirer un problème.

Quelques exemples : la salve de départ a surpris tout le monde, y compris l’équipe de Trump. Ses adversaires ont rapidement rempli le vide avec leur (feinte) indignation, réussissant à façonner le premier cycle de nouvelles et gagnant le momentum. Son équipe s’attendait-elle à des félicitations ?

Aggravant l’aspect unilatéral du licenciement, il se trouve que Comey était à Los Angeles lorsque la lettre de renvoi a été remise à son bureau de Washington.

Le travail bâclé du personnel de la Maison-Blanche a fait en sorte que Comey a appris son renvoi en le voyant annoncé à la télévision, ce qui a eu pour effet de le rendre sympathique et de faire paraître le personnel du président incompétent ou méchant.

Ensuite, il y a eu Trump lui-même, soufflant sur les braises.

Son commentaire à NBC selon lequel il avait décidé de licencier Comey bien avant que le procureur général Jeff Sessions et son adjoint, Rod Rosenstein, l’aient recommandé venait contredire l’explication chronologique officielle.

Le bureau de presse et le vice-président Mike Pence citaient la recommandation de Sessions et Rosenstein pour expliquer la décision. En fait, la lettre de Trump à Comey la citait également, disant : “J’ai accepté leur recommandation et vous êtes par la présente renvoyé…».

Soudainement, ce n’était plus vrai, assénant un coup fatal à la crédibilité de l’administration.

Puis, vendredi, Trump a aggravé son cas en avertissant Comey dans un tweet de ne pas causer de fuites.

Voilà un président qui déclenche des spéculations sur des enregistrements secrets au Bureau Ovale comme un ingénieur naval émettant des doutes sur la solidité du Titanic. Non ! Non ! Non !

Pendant ce temps, alors qu’il devient évident que le renvoi de Comey a été décidé à la hâte, la recherche d’un remplacement est commencée par Fox News disant qu’il y a 11 candidats possibles.

Alors, pourquoi tant de précipitation à créer une vacance s’il n’y a pas de candidat plus qualifié de disponible et surtout lorsque le directeur intérimaire, Andrew McCabe, apporte ses propres bagages politiques ?

Les vérifications de fond et les audiences de confirmation pourraient prendre des mois.

Je reconnais qu’il est encore tôt pour l’Administration, et que le talent de Trump pour causer des perturbations fait partie de son charme. Je reconnais également que sa campagne a souvent déraillé et il s’en est toujours tiré avec les honneurs, causant un des plus grands bouleversements politiques de l’histoire américaine.

Mais une présidence, malgré sa puissance et sa grandeur, demeure fragile. Sa force vient du consentement des gouvernés et son mandat de gouverner doit être constamment gagné et élargi. Rien n’est garanti.

Trump peut prospérer dans le chaos, mais son personnel, le gouvernement et le public ont besoin de plus d’ordre et de certitude. Parce qu’il a hérité de nombreuses crises, il n’est pas nécessaire d’en créer de nouvelles.

Alors, voici ma plaidoirie, Monsieur le Président : faite en sorte que ce soit plus facile de garder la foi. Vous allez accomplir beaucoup plus et beaucoup d’autres Américains seront fiers d’être de votre côté.

traduction et adaptation © Magali Marc (@magalimarc15) pour Dreuz.info.

*Alan M. Dershowitz, ex-professeur de droit, émérite, à Harvard Law School, a pris sa retraite en 2013. Pendant les primaires du Parti démocratique de 2008, Dershowitz a appuyé Hillary Clinton, l’appelant “progressiste sur les questions sociales, réaliste en matière de politique étrangère, et pragmatiste en économie. En 2012, il a fortement soutenu la réélection de Barack Obama.

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