Trump contre les rêveurs de l’« Ordre Mondial »

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Par Yves Mamou pour Dreuz.info

Le président américain a bousculé les partisans du sacrosaint « ordre mondial » parce qu’il n’avait pas le choix. On ne raisonne pas les tenants d’une religion.

The Economist a donné le ton : « Donald Trump mène une lutte mafieuse pour le pouvoir mondial ». The Guardian s’est inquiété « des conséquences pour l’ordre mondial du surgissement de Trump 2.0 ». The New York Times a angoissé que «Trump et Poutine se rapprochent, car c’est le monde qui s’effondre ». Pour France Inter, Donald Trump est « l’apprenti sorcier qui veut changer l’ordre mondial ». Pour Radio Canada, Trump a mis « la hache dans l’ordre mondial ». L’expert militaire américain John Robb a regretté de voir « s’effondrer le système international dirigé par les États-Unis ». La lettre d’information américaine Axios a évoqué « l’implosion d’un ordre international forgé après la Seconde Guerre mondiale ». … Et ainsi de suite, à l’infini.

Cette unanimité médiatique ne reproche rien de vraiment précis au président américain. Mais telle n’est pas sa fonction. Son but est de diaboliser. Faire frémir, telle est la consigne : le « sulfureux » Donald Trump a encore frappé. The Economist est carrément insultant : un Al Capone ivre met à feu et à sang ce jardin de roses qu’est l’« ordre international ».

Pourquoi les médias agissent ils ainsi ? Parce qu’ils n’aiment pas le changement, et pour certains comme The Economist, chantre de la mondialisation, parce qu’ils n’aiment pas ce changement-là.

Aujourd’hui, le monde occidental est divisé en deux camps : ceux qui défendent la mondialisation telle qu’elle a été mise en place ces quarante dernières années, et ceux qui, comme Donald Trump, estiment qu’elle a mal tourné.

Le 15 janvier, en deux phrases, Marco Rubio, Secrétaire d’État, a donné devant la Commission des affaires étrangères du Sénat américain, le sens de l’action de Donald Trump : « L’ordre mondial d’après-guerre n’est pas seulement obsolète ; il est devenu une arme utilisée contre nous. »

L’Amérique a cru qu’elle n’avait plus d’ennemi

Marco Rubio a résumé l’affaire devant le Sénat : à la fin de la Seconde Guerre mondiale, les États-Unis s’étaient donnés pour mission de jeter les bases d’un « nouvel ordre mondial ». Face à la menace soviétique, Washington a réussi à fédérer l’Europe de l’Ouest, une partie de l’Orient et de l’Extrême-Orient… et cette alliance économique et politique a abouti à l’affaissement de l’empire soviétique.

La chute du Mur de Berlin a été euphorique. Un moment d’ivresse que Marco Rubio résume ainsi : « Nous étions arrivés à la fin de l’Histoire, toutes les nations du monde allaient désormais devenir membres de la communauté démocratique dirigée par l’Occident ; une politique étrangère qui servait les intérêts nationaux pouvait désormais être remplacée par une politique qui servait l’ordre mondial libéral ; et l’humanité tout entière était désormais destinée à abandonner sa souveraineté et son identité nationales pour devenir une seule famille humaine et des citoyens du monde. »

Cette longue phrase – que le lecteur la relise s’il le faut – résume une épopée messianique occidentale. Le Mal soviétique une fois disparu, les élites américaines ont cru que le Mal en soi avait disparu. L’Amérique n’avait plus d’ennemi, seulement quelques compétiteurs. Et encore, pas très dangereux ! « Ce n’était pas un simple fantasme » dit Marco Rubio… c’était une dangereuse illusion ».

N’ayant plus d’ennemi, les États-Unis et nombre de pays européens ont baissé la garde et se sont même dépouillés volontairement. Notre « engagement quasi religieux en faveur d’un commerce libre et sans entraves », dit Rubio, « a réduit la classe moyenne, plongé la classe ouvrière dans la crise, fait s’effondrer notre capacité industrielle et a propulsé des chaînes d’approvisionnement essentielles entre les mains d’adversaires et de rivaux ».

En effet, les grandes entreprises occidentales ont saisi l’occasion de réaliser des surprofits : elles ont délocalisé en Chine, et massivement. Elles ont appauvri leur pays d’origine et aidé la Chine communiste à devenir un “marché” riche et prospère. Les politiques eux, ont cru qu’en enrichissant les communistes, la Chine communiste deviendrait un pays capitaliste comme un autre.

Ils se sont trompés. La Chine est demeurée un clone totalitaire de feu l’Union Soviétique, animée d’une même volonté hégémonique.

Marco Rubio a expliqué que la Chine communiste avait menti, triché, piraté et volé pour devenir une superpuissance aux dépens du monde libre. Loin de se fondre dans le « concert des nations », loin de renoncer à son identité comme les pays occidentaux l’ont fait, loin de célébrer un monde sans frontières, la Chine a tiré parti de tous les avantages qui lui étaient offerts sans respecter aucune des règles. Elle a fait tourner l’ordre commercial mondial à son avantage… au point de représenter aujourd’hui une menace militaire.

L’immigration, le deuxième mythe néolibéral

Non seulement les Occidentaux se sont persuadés que la libre circulation des marchandises allait engendrer un ordre planétaire nouveau, mais ils ont cru aussi que la libre circulation des personnes permettrait d’en finir avec le nationalisme, source de tous les maux. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les élites occidentales se racontent que la nation est la source de tous les totalitarismes. Un « droit » à l’immigration a été institué – ce qui a permis de faire baisser le coût du travail – mais aussi et surtout de laminer les identités nationales.

Sur ce plan aussi, la nouvelle administration américaine a dissipé les vapeurs de l’ivresse. L’immigration de masse est une menace. « Ici, aux États-Unis, mais aussi dans le monde entier, (l’immigration) est une crise qui déstabilise sociétés et gouvernements » a dit Rubio.

À Munich, lors de la Conférence sur la sécurité qui a eu lieu du 14 au 16 février, J.D. Vance, vice-président américain, a enfoncé le clou. Il a expliqué aux dirigeants européens que l’immigration de masse, et l’immigration musulmane en particulier, est plus menaçante que la Russie ou la Chine. « De toutes les urgences et de tous les défis auxquels sont confrontées les nations (européennes) représentées ici, je crois qu’il n’y a rien de plus urgent que la migration de masse. Aujourd’hui, près d’une personne sur cinq vivant dans ce pays (l’Allemagne) est un immigré. Il s’agit d’un chiffre record. Et la situation est la même aux États-Unis » a affirmé Vance aux dirigeants européens.

Vance et Rubio ont adjuré les gouvernements européens de dessaouler. Réveillez-vous ont-ils dit. Ce rêve d’un monde sans frontières fait de vous les ennemis de votre propre peuple : « Partout en Occident, les gouvernements censurent et poursuivent même en justice leurs opposants politiques. Pendant ce temps, des djihadistes radicaux défilent ouvertement dans les rues et, malheureusement, foncent (en voiture) sur nos concitoyens » avait déclaré Rubio devant le Congrès. « Je peux vous le dire clairement : il ne peut y avoir de sécurité si vous avez peur des voix, des opinions et de la conscience qui guident votre propre peuple », a renchéri J.D Vance à Munich.

Et maintenant ?

La vérité est que le discours un peu brutal des dirigeants américains et la calamiteuse réunion de presse entre Donald Trump, JD Vance et Vladimir Zelenski dans le bureau ovale de la Maison Blanche ont creusé plus encore la ligne de fracture au sein du monde occidental : les Européens ne veulent pas renoncer à l’utopie du libre-échangisme. Et l’idée de donner raison au Vandale peroxydé de Washington leur soulève le cœur. Ils seraient même assez tentés de se dresser contre lui. Gentils mondialistes contre méchants (ultra)nationalistes.

Les Européens mondialistes aimeraient bien faire de la défense de l’Ukraine un étendard mobilisateur. Ils prendraient ainsi leur indépendance par rapport à Washington, souderaient les foules en un mythique « peuple européen » et deviendraient le pôle glorieux qui défend l’idée d’un monde ouvert.

Le seul problème est qu’ils ne sont pas unis (l’Union européenne n’a rien d’un bloc homogène), qu’ils ne disposent pas d’une industrie de défense capable de subvenir aux besoins de l’Ukraine, qu’ils n’ont pas les moyens militaires de garantir à l’Ukraine sa sécurité et qu’ils ne peuvent se doter rapidement d’un outil militaire capable d’impressionner la Chine et la Russie, sans parler des États-Unis.

Ils aimeraient bien agir contre Trump, mais ne peuvent se passer des États-Unis.

Dilemme !

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