Par LPH INFO – Par Eden Levi Campana
Le 20 février 2025 est l’enterrement d’une illusion. Une date gravée dans la chair de l’humanité comme une brèche béante. Une fracture entre un ultime espoir de paix et un fatidique renoncement. Aujourd’hui, la solution à deux États a été ensevelie. Non pas comme une idée qui aurait évolué vers une autre forme mais comme une utopie réduite en flammes et en cendres. Ce concept est mort sous le poids du sang versé, du silence complice, des illusions démenties.
Nous sommes tous des pacifistes. La paix oui, la paix encore, la paix toujours, la paix plus fort que tout, mais la paix pas à n’importe quel prix. L’histoire d’Israël n’a jamais été celle d’un peuple qui plie face à la cruauté. Nous savons qui nous sommes, ce que nous sommes, ce que nous valons, individuellement et collectivement. Cette intelligence, cette bienveillance n’est pas de la naïveté. Notre humanisme n’est pas un appel à tendre l’autre joue. Nos sages enseignent dans le Talmud (Sanhédrin 72a) : « Si quelqu’un vient te tuer, lève-toi et tue-le d’abord. » Dont acte. Ce principe n’est pas un appel à la violence aveugle, et même pas un appel à la moindre violence. Il est un droit à la légitime défense, à la nécessité de se prémunir contre ceux qui cherchent à annihiler le peuple juif, dans sa propre demeure. Pour ceux qui doutent, Amalek n’a jamais disparu, il danse désormais autour de cercueils d’enfants massacrés.
Ce matin, Israël n’a pas accueilli ses enfants, il a reçu quatre cercueils. Quatre linceuls comme autant de sentences, scellés dans le silence du deuil. À l’aube les Israéliens, dignes, le long des routes, sous la pluie, pleuraient. Shiri Bibas, 32 ans. Ariel Bibas, 4 ans. Kfir Bibas, 9 mois. Oded Lifshitz, 83 ans. Ils s’interrogeaient : que nous enseigne le Midrach (Bamidbar Rabba 20:24) ? « Lorsque le sang innocent est versé sur la terre, il crie jusqu’aux cieux. » Les âmes des familles Bibas et Lifshitz crient depuis la poussière, et pourtant, le monde reste sourd. La terre elle-même est témoin du crime. Mais où est la justice ?
Le Hamas n’a pas rendu des corps, il a livré une ignominie. Ce n’était pas une restitution, c’était un étalage, une victoire sous forme de suicide. Leur suicide. Un spectacle, une propagande sinistre, un affront orchestré dans les rues de Khan Younès, devant une foule en liesse. Cercueils noirs, slogans jetés dans l’air en un vacarme ignoble. Les mères qui applaudissent, les enfants qui hurlent et appellent au meurtre. Des hommes en armes… enfin des hommes, des marionnettes, pour mettre en scène une profanation obscène, sur une estrade.
Oded Lifshitz, lui, a été toute sa vie un partisan inlassable de la paix. Il croyait à la solution à deux États, il la rêvait, il la portait, il l’espérait. Il militait, tendait la main, aidait les Gazaouis du mieux qu’il pouvait, avec la conviction que la coexistence était possible. Cette croyance, son engagement, sa foi en l’avenir se sont éteints avec lui. Assassinés dans le même élan.
Quant aux enfants Bibas, ils n’auront pas eu le temps de se forger une opinion. Ariel n’aura jamais le temps de se poser ces questions, Kfir n’aura jamais l’âge de douter ou d’espérer. Ils n’avaient d’autre ambition que d’apprendre à rire, à courir, à aimer. Leur seul avenir était de grandir, bercés par la chaleur d’une famille qui ne vivra plus jamais complète. Un assassin n’a pas laissé cet avenir s’écrire. Ariel et Kfir ont été tués par étranglement à Gaza par un ou plusieurs ravisseurs, et non par un bombardement israélien comme l’affirme le mouvement terroriste palestinien. Shiri, sous prétexte d’une erreur, le corps sera rendu le lendemain. Oui. Ariel Bibas, 4 ans. Kfir Bibas, 9 mois. Assassinés par des mains indignes, par des hommes indignes, par des organisations indignes, au nom d’une cause désormais irrémédiablement indigne. Quoi d’autre ?
Dans un monde où l’indignation est à géométrie variable, l’horizon demeure inerte. Pas un mot. Pas un cri. Pas une révolte. Silences complices, silence accablant. Face à cela, où sont les Justes ? Au 1er janvier 2023, 659 Allemands ont été reconnus comme Justes parmi les Nations par Yad Vashem. Et à Gaza ? Dans les pays arabes ? Dans le reste du Monde ? Face à cela, que font les Justes ? Rien. Silence. Un silence plus retentissant que toutes les explosions. Un silence pesant comme une trahison. Comme dans la parachath Vayichla’h, où Ya’akov envoie des messagers à Esaü. La paix n’est pas possible avec ceux qui nourrissent la haine dans leur cœur. Il ne peut s’agir que de haine, d’antisémitisme, ou de bêtise crasse. Pas un artiste, pas un leader d’opinion, pas un intellectuel non-juif, sur aucun réseau, sur aucun média ne s’est exprimé pour l’instant. Malgré nos recherches méticuleuses, rien, le néant. Il faut en convenir, cette indifférence n’est pas un oubli, c’est une négation, un effacement (souhaité). Voir, c’est savoir. Savoir, c’est agir. Alors ils ne veulent ni voir, ni savoir. Nous redoutons le moment où ils vont savoir, nous redoutons le moment où ils vont voir, jamais, nous l’espérons. Pourtant ce qui se joue ici ne concerne pas seulement Israël. Avec environ 1,8 milliard de musulmans dans le monde, comment mesurer l’ampleur réelle de la radicalisation ? Comment savoir où se jouera la prochaine tragédie ? Dans quelle partie du Monde ? D’Al-Qaïda à Daech, en passant par Boko Haram, Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI), Al-Shabaab, le Hezbollah, le Hamas, Ansar al-Islam, les Talibans, Jemaah Islamiyah et l’État islamique en Khorasan (ISIS-K), les Frères musulmans, ils peuvent toucher n’importe qui, n’importe où. Certains sont partisans du jihad global, d’autres de la domination régionale, mais quelles différences ?
Les Juifs ? Ils savent faire. Ils ont une longue expérience. Dans le Séfer Devarim (20:1), il est écrit : « Quand tu partiras en guerre contre ton ennemi et que tu verras des chevaux et des chars, un peuple plus nombreux que toi, tu ne le craindras pas, car Hachem, ton D’, est avec toi. » C’est un début de réponse, mais pas le seul. Car en réalité, nous le savons, il n’y aura pas de répit face à ceux qui ne conçoivent qu’une seule issue : l’anéantissement d’Israël. Il n’y aura pas d’avenir partagé avec ceux qui ne tolèrent pas son existence. Avec ceux qui ne visent que la mort et le chaos.
Ce soir, trois bus ont explosé à Bat Yam, au sud de Tel-Aviv. L’aube aurait pu voir ces véhicules bondés fendre les rues. Heureusement, ils sont devenus poussière avant même d’avoir transporté une seule vie. Le spectre de la seconde Intifada ressurgit, ramenant en mémoire ces jours où chaque bus était un tombeau. Cinq engins de mort répertoriés : trois ont explosé, projetant flammes et débris, deux ont été désamorcés de justesse. Alerté, le Premier ministre Benyamin Netanyahou a convoqué une réunion de crise. Dans la foulée, le ministre de la Défense, Israël Katz, a ordonné un renforcement des opérations militaires en Judée et Samarie, notamment dans le camp de Tulkarem. Comme un aveu signé de la main des bourreaux, ou une énième provocation, ce nom était inscrit en arabe sur l’un des explosifs. Les enquêteurs estiment que ces engins explosifs avaient été savamment programmés pour se déclencher le lendemain, aux alentours de 9 heures, faisant planer la menace d’un véritable carnage. En réaction, la ministre israélienne des Transports, Miri Regev, a décrété la suspension immédiate de l’ensemble du réseau de bus, trains et métros, ordonnant des contrôles de sécurité rigoureux afin de déjouer tout autre péril.
Et pourtant, le monde exige d’Israël qu’il cède. Qu’il plie. Qu’il se soumette sous le poids d’un dialogue illusoire. À quoi bon négocier avec ceux qui transforment ses morts en trophées de propagande ?
Non. Non et encore non.
Et puis, dans la nuit, le rapport d’autopsie, l’inimaginable : l’un des corps remis n’était pas celui de Shiri Bibas. Une ultime trahison. Une ultime cruauté. Jusqu’au bout, le crime s’étire, s’étend, se prolonge dans une dérive insoutenable. Nous voici en prise avec un nouveau chantage.
Voilà la réalité d’Israël. Voilà la réalité d’un peuple. Voilà les couleurs d’une Nation juste et équitable. Le noir et l’orange. Le noir du deuil sur les affiches, le noir des fumées épaisses des bus en flammes, l’orange des cheveux de Kfir et Ariel devenu symbole, l’orange des véhicules consumés par les bombes. Deux couleurs. Deux réalités. Une même tragédie. Une même journée. Un chiasme de la souffrance, un parallélisme de la douleur.
Oui, cette journée est une journée de deuil. Dans les flammes de la folie et dans le silence complice de ceux qui préfèrent regarder ailleurs. Avec elle, s’est éteinte la dernière illusion d’une paix chimérique. Avec elle, s’est dissipé le mirage d’un dialogue inexistant. Avec elle, est tombée l’ultime espoir nourri par un Occident aveugle. Le Maharal de Prague (Netza’h Israël, chap. 25) nous explique que les exils du peuple juif ne sont pas simplement physiques, mais aussi spirituels. Que dire des dirigeants, de ces leaders politiques qui jugent et condamnent Israël ? Ils ne veulent pas comprendre ? La lutte actuelle n’est pas uniquement une guerre de missiles et d’attentats ; c’est une guerre pour la vérité, une guerre contre l’oubli, une guerre contre le mensonge. Il est temps d’ouvrir les yeux. Il est temps de comprendre. Il est temps de regarder ces images d’enfants de Gaza qui dansent devant les cercueils de Kfir, Ariel et Oded. Le Zohar nous enseigne (Vayikra 34a) que certaines guerres ne sont pas menées pour le territoire, mais pour l’effacement d’une identité. C’est ce qui se joue ici.
Le monde hésite encore. Israël, lui, sait. Il a payé pour voir.
Eden Levi Campana