Parachath Chemoth – l’éducation dans la Tora

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Autour de la table de Chabbath n°471 Chemoth                                                                                          

Sur l’éducation dans la Tora

On profite du début du livre de Chemoth pour vous parler d’un sujet global : l’éducation des enfants. En effet, l’exil en Egypte est décrit par les Sages à l’image de la fonte du fer : ‘Kour HaBarzel’. C’est l’étape dans la fabrication des métaux où l’on retire toutes les impuretés de la matière. De la même manière, la période très difficile de l’exil égyptien avait pour but de purifier le Clall Israël afin de le rendre apte à recevoir la Tora et les commandements au Mont Sinaï. Pour nous aussi, l’éducation journalière que l’on pratique avec nos chères petites têtes blondes ou brunes, c’est pour les amener avec l’aide du Tout-Puissant à garder tout au long de leur vie le goût pour la Tora et les Mitsvoth.

Passons maintenant au développement.

On est tous conscient de la grande tâche qu’ont les parents juifs d’éduquer leurs enfants. Ce n’est pas seulement la volonté de les voir ‘se débrouiller’ seuls quand ils arriveront à l’âge de la majorité : ça, toute l’humanité et même l’animal (à quatre pattes jusqu’au volatile) a le même souci… Mais pour nous, les parents impliqués dans la vie communautaire, c’est bien plus. On espère que notre progéniture continuera à porter le flambeau de la connaissance de la Tora pour les générations à venir. L’enjeu est bien plus grand, car toute la Création du Monde dépend de cela.

Notre sujet est de savoir s’il existe véritablement une Mitsva/un commandement d’éduquer les enfants dans la Tora ? Le sujet est vaste, mais on se suffira de ce que rapporte le Steipler dans un de ses écrits. Il explique ainsi les grands principes dans le domaine.

C’est que la Mitsva d’éduquer n’est décrétée que par nos Sages. En effet, la Tora s’adresse à l’homme à partir du moment où il atteint sa majorité religieuse : 13 ans. Avant cela, l’action de l’enfant n’est pas réprimandable car le jeune n’a pas l’intelligence suffisante pour appliquer la Tora et les Mitsvoth. Cependant, il existe une Mitsva de nos Sages d’éduquer l’enfant d’après ses capacités dans les Mitsvoth. C’est-à-dire que chaque père de famille doit veiller à habituer son jeune enfant à la Tora. Le but étant qu’arrivé à l’âge adulte, il continue par lui-même de suivre la Tora. Et pour nos érudits, il faut savoir qu’il existe une discussion entre Rachi et Tossafoth (Berakhoth 48) si cette Mitsva repose sur le père (Rachi) ou uniquement sur le fils (Tossafoth). L’incidence de la question se présente dans le cas où mon fils – qui n’est pas encore Bar Mitsva – veut me rendre quitte d’une Mitsva derabanane. Si on tient que l’obligation de faire les Mitsvoth repose sur l’enfant lui-même alors il pourra me rendre quitte de ma Mitsva (quand elle n’est QUE des Sages). En revanche, si on considère que c’est une obligation du père vis-à-vis de son enfant, le jeune ne pourra pas le rendre quitte.

Qu’en est-il de l’obligation de la maman vis-à-vis de son fils ? Une grande nouveauté pour nous, c’est que le Steipler soutient l’opinion selon laquelle la Mitsva d’éduquer ses enfants incombe au PERE en particulier. Il est certain que la mère, en veillant à ce que son fils aille étudier au Talmud Tora aura une belle part dans la Mitsva de l’enfant. Mais d’après la Guemara Nazir-28, elle n’a pas d’obligation à proprement parler. Intéressant, non ? D’après cela on comprendra encore mieux la fameuse Guemara de Berakhoth qui demande comment les femmes hériteront du monde futur alors qu’elles sont exemptes de l’étude de la Tora ? On sait bien que le carton d’invitation là-haut, à 120 ans, dépend en grande partie du Limoud Tora. La réponse du Talmud c’est par le fait qu’elles s’efforcent d’envoyer leurs fils au Talmud Tora et leur mari au Beth Hamidrach, cela montre une grande abnégation de leur part, et donc en cela elles auront droit au Gan Eden.

Passé le cap des 13 ans, l’enfant devient homme et sera astreint à toutes les Mitsvoth comme TOUT le monde. Cependant, il reste que les parents devront veiller à ce que leur petit Yankelé continue de suivre le chemin doré de la Tora. Comme la Guemara Kidouchin 30 (d’après la deuxième explication de Rachi) rapporte le verset du roi Salomon, les proverbes : « Eduque le jeune d’après ses propres APTITUDES car même lorsqu’il grandira, il ne se détournera pas de la voie ». De ce verset on apprend que tant que le jeune est à l’écoute de ses parents, même la vingtaine passée, les Sages ordonnent aux parents de guider leur progéniture. De tout cela, on voit que l’éducation incombe aux parents depuis le plus petit âge de l’enfant jusqu’à l’âge adulte. Et peut-être qu’au-delà de l’éducation de nos chères petites têtes blondes, il y a l’éducation des parents…eux-mêmes. Car lorsque tous les jours, matin et soir, le père ou la mère (ou les DEUX à la fois) doivent se montrer attentif aux plaintes de l’enfant par rapport à ce qui se passe en classe, où des difficultés scolaires qui peuvent exister, etc. Le fait de rechercher une solution à tous ces multiples petits problèmes, en soi, les parents se perfectionnent eux-mêmes. C’est aussi le but de la grande œuvre qu’est l’éducation. Pour finir on rapportera une petite anecdote au nom du rav Moché Kaufman Chlita (qui a écrit beaucoup sur l’éducation : Lev Avoth ‘al Banim/il existe en français) sur le Steipler, rav Ya’akov Israel Kaniewsky zatsal. Il donnait deux grands conseils sur l’éducation des enfants : la PRIERE (des parents vis-à-vis de leurs enfants), et l’exemple personnel. Plus d’une fois on voyait le grand rav prier et verser de chaudes larmes sur son petit ‘Haïm afin qu’il devienne grand dans la Tora. Et ‘Haïm avait alors (devinez..) près de 50 ans (!) quand son père versait encore des larmes. Certainement que Ses prières ont bien été reçues dans le ciel car ‘Haïm était devenu le ‘prince’ de la Tora : le grand rabbi ‘Haïm Kaniéwsky zatsal.

Sur la paracha

Dès le début de la paracha sont décrits les terribles décrets de Pharaon contre le Clall Israël. C’est le travail harassant, ainsi que la mise à mort des bébés garçons. Car Pharaon a vu par l’astrologie que le libérateur du Clall Israël devait bientôt naître. La Guemara dans Sota 12 dit une chose très intéressante. C’est que Pharaon avait trois conseillers lorsqu’il établit le décret de mise à mort de tous les nouveaux nés hébreux. C’était Yitro, qui deviendra plus tard le beau-père de Moché, Job et Bilam. Et le Talmud dit quelque chose d’extraordinaire, c’est que chacun va être ‘récompensé’ selon la manière dont il a conseillé Pharaon. C’est ce qu’on appelle Mida Kenégued Mida, Mesure pour mesure ! En effet, Yitro en entendant la tournure des évènements, n’a pas voulu s’associer à ce terrible complot contre la communauté juive et fuira dans le désert. Or cet homme avait une fonction très importante en Egypte : c’était lui, le grand prêtre du pays. Malgré tout, il a préféré perdre sa position importante ainsi que tous les honneurs qui lui étaient dus pour ne pas participer à l’extermination en masse du peuple juif. Job quant à lui s’est tu, tandis que Bilam a appuyé la décision sanguinaire du roi d’Egypte. Les résultats seront que Yitro sera récompensé par le fait que sa descendance siègera au grand tribunal du Sanhédrin de Jérusalem. Mesure pour mesure : il a fait fi de ses honneurs et finalement il retrouvera son Kavod dans sa descendance. Bilam qui a incité le décret de mort contre le Clall Israël sera tué dans une guerre contre le campement d’Israël dans le désert. Job quant à lui subira beaucoup de souffrances par la maladie, perte de ses enfants et de sa fortune… comme on le sait bien. Le rav de Brisk, rav Yits’hak Zéev Soloveitchik zatsal, pose une belle question. Voilà que chacun reçoit la monnaie de sa pièce. C’est vrai pour Bilam qui sera tué et Yitro qui finalement recevra tous les honneurs perdus. Mais qu’en est-il de Job ? Que lui reproche-t-on finalement ? Il n’a pas participé à la Solution Finale contre le peuple juif ? Mieux encore il existe une Halakha comme quoi on n’a pas de Mitsva de réprimander son prochain quand on sait pertinemment qu’il ne va pas accepter nos paroles. Or Job sait bien que Pharaon n’est pas prêt à revenir sur sa décision. Donc en quoi le silence de Job est-il si problématique ? Intéressante comme question,  non ? La réponse du rav, c’est que Hachem lui enverra de terribles punitions afin qu’il… CRIE ! Hachem vient lui apprendre qu’il y a des situations où l’on sait pertinemment que sa parole ne sera pas écoutée, pourtant il faut crier et dire l’injustice et peu importe s’il y a utilité. De la même manière, lorsque, que D’ nous en préserve, on est touché dans sa chair par la maladie, l’homme criera sa douleur même s’il n’y a aucune utilité. Par les terribles punitions dont écopera plus tard Job, Hachem vient lui montrer qu’au moment où il était le proche conseiller du roi, il aurait dû RESSENTIR la douleur de tout un peuple, même étranger à lui. Et le fait qu’il est resté impassible à toute cette souffrance, entrainera qu’il sera puni dans sa chair et qu’il criera aux murs de sa maison. De là on apprend quelque chose d’assez fondamental dans la vie d’un homme : c’est de ne pas être insensible aux souffrances de son prochain. Et au contraire, l’insensibilité dans ce domaine est une marque de faiblesse de sa personne. Et même si on ne peut pas grand-chose, au moins on devra s’ASSOCIER à la souffrance de son ami.

On rajoutera une anecdote sur un des grands du Clall Israël, le rav Steinman zatsal. Ce grand rav ne s’adossait pas sur le dossier de sa chaise, depuis de nombreuses années. La raison évoquée parmi ses élèves, c’est que le rav avait pris cette habitude afin de S’ASSOCIER à toute la souffrance du peuple juif durant la dernière guerre. Le rav avait compris qu’il n’était normal de jouir de ce monde en toute tranquillité après ce qui s’est passé. A méditer !

Le sippour

Suite et fin du « jeune garçon qui nous donne une grande leçon de Emouna »

La semaine dernière j’ai commencé un sippour véridique en deux parties. Il s’agit du jeune Ya’acov (Yankélé) Potach agé de 13 ans qui, pour se sauver de l’avancée de nazis en Lituanie, part à pied pour une destination inconnue et au final arriva dans un Kolkhoze en Ouzbékistan (à plus de 1000 km de la Lituanie). Là-bas il fera bien attention de cacher son identité pour qu’on ne le soupçonne pas d’être juif. Il portait à longueur de journée une casquette et se retrouvait sur un tracteur à labourer les grands champs de la région. En cachette il faisait son possible pour accomplir les Mitsvoth (il n’a jamais mangé une seule fois de la viande) et dans un carnet il notait les jours de la semaine à savoir quand tombait le Chabbath et les fêtes. Avec le temps il devint très apprécié du Kolkhoze car jamais il ne s’était disputé avec les ouvriers. Cependant il gardait ses distances avec eux en dormant seul dans une petite bicoque (pour ne pas se confondre avec la communauté musulmane). Avec le temps, les nouvelles terrifiantes de Pologne arrivèrent jusque dans ce coin perdu au sujet des communautés juives d’Europe décimées… Ya’akov était bouleversé mais ne disait mot à quiconque : il gardait en lui l’espoir de retrouver sa famille…

Un soir, un groupe de gaillards viennent dans son gîte et l’informe que le chef de village veut le rencontrer au plus tôt. Au Kolkhoze, le chef contrôlait d’une main de fer toute la communauté et tout le monde le respectait car sa colère et sa force faisait peur à tous. Yankélé se présenta devant lui. Le chef lui dit : « Je vois que tu es un garçon persévérant et ton travail est de qualité. J’ai une fille qui est en âge de mariage. Je veux que tu la prennes pour épouse et je te donne un cheptel de moutons et d’agneaux en guise de dote. Dès demain on scellera les fiançailles au Kolkhoze ». Le chef du village attendait de voir une expression de joie chez Yankélé (car qui ne rêverait pas de devenir le gendre du chef incontesté du Kolkhoze et de surcroit d’hériter d’un troupeau en ses années de guerre ?) Mais Ya’akov avait tout autre chose en tête : il était abasourdi car il avait la hantise de se marier avec une non-juive… même pour tout l’or du monde. Il ne disait rien, le soir même il revint dans sa bicoque tandis que la nouvelle parcourut toutes les petites routes du Kolkhoze. Les travailleurs étaient renversés par une telle proposition si mirobolante en se disant, quelle chance Ya’akov avait de se marier avec cette fille ! Le lendemain matin dès que le soleil pointa, Ya’akov était déjà sur son tracteur dans les champs. Plus tard dans la journée il devinait au loin l’effervescence qui parcourait le village car un orchestre se préparait à jouer pour ses fiançailles. D’ici peu, les gens du village allaient le prendre pour l’amener sous le dais nuptial. Ya’acov abandonna son tracteur et fonça dans sa cabane, rassembla ses quelques affaires et tomba sur une liasse de tickets d’approvisionnement de viande (durant toute cette période il n’a jamais mangé Bassari et avait accumulé un grand nombre de tickets). En voyant tous ces bons, il savait que du Ciel on lui offrait la possibilité de fuir l’endroit. De suite il partit au pas de course vers la forêt. La densité des arbres et du feuillage le cachait bien. Il s’installa dans une prairie pour passer la nuit. Au petit matin il devina que pas loin du lieu, il y avait un petit avion. Il s’agissait de la ligne postale aérienne entre Samarkand et ce bled perdu. Une fois par mois ce petit engin amenait dans cette région reculée des denrées manufacturées de la ville. Ya’akov se précipita vers le pilote en le suppliant de le prendre pour son retour. Le pilote refusa, c’est alors que Ya’akov sorti de son sac la liasse de tickets d’approvisionnement. Le pilote des soviets fit de gros yeux et accepta finalement que Ya’akov monte avec lui dans son avion. Apres quelques heures de vol, Ya’akov arriva dans la grande ville de Samarkand. La première chose qu’il fit c’est de se diriger vers une synagogue de la ville. A l’époque de la fin de la guerre, la ville était remplie de réfugiés juifs provenant de toute l’Europe. Yankélé s’installa sur un des bancs de la Beth-Haknesset en attendant qu’on le prenne en pitié. Cependant l’époque était très dure et la communauté était très méfiante envers tous les espions du KGB qui truffaient les lieux de cultes afin de dénoncer au pouvoir de Staline Yima’h Chémo toute marque de religiosité. Ya’acov était alors vêtu de haillons, les cheveux hirsutes et le teint foncé par le soleil des steppes. Il restera plusieurs jours consécutifs jusqu’au jour ou deux Avrékhim s’installèrent dans l’endroit et étudièrent un passage du Talmud. A un moment ils ne trouvèrent pas de réponse à une question d’un Tossafoth. Yankélé s’est approché d’eux et leur dit qu’il se souvient d’une réponse donnée par le Gaon Rabbi Aharon Kottler zatsal. Les deux Avrékhim étaient abasourdis de voir devant eux un jeune Juif qui avait échappé aux tueries de Pologne et de Lituanie. De suite, ils le prirent sous leur coupe. L’un des deux Avrékhim était Yom Tov Eihrlich, ‘Hassid du rabbi de Stolin, et deviendra le grand ami de Ya’akov. Après la guerre Ya’akov et Yom Tov arriveront à Paris. Ya’acov se mariera avec une jeune fille « Yantél » : rescapée elle aussi des camps et fonderont leur couple suivant les lois de la Tora. Les deux couples d’amis s’installeront après leur mariage en Erets Israël. Seulement, le rav Aharon Kotler, qui était installé en Amérique, appellera Ya’akov, son ancien élève, à venir en Amérique pour participer à sa nouvelle Yechiva de Lakewood.

Longtemps après, le rav Eihrlich demandera à Ya’akov comment avait-il fait pour garder le judaïsme dans les steppes au fin fond de la Russie, loin de sa Yechiva et de sa famille, etc. ? Ya’akov répondit : ‘Je me souvenais de mon enfance et je voyais ma mère, que Hachem venge son sang, qui travaillait de toute ses forces comme aide-meunière. Elle revenait à la maison avec les doigts boursoufflés des frottements de la meule. Elle travaillait dure pour amener la parnassa et plaçait ses doigts sur les flammes pour faire dégonfler les boutons. J’avais le cœur déchiré de voir ses douleurs. Je lui demandais souvent : pourquoi tant de souffrance ? Elle me répondait en pleurs : « Yankélé, je veux que mes enfants grandissent dans la Tora et aient la pleine crainte du Ciel. C’est pourquoi je me sacrifie pour cette cause et c’est pourquoi je travaille d’arrache pied« . Tout le temps de mon exil j’ai vu l’image de ma mère qui était devant moi. Lorsque je dormais seul dans la steppe, pour ne pas me mélanger avec les autres travailleurs, je me rappelais des paroles de ma mère et cela me donnait du courage pour ne pas flancher. Je ne voulais pas la décevoir dans le monde à venir.

Ya’akov Potach zatsal fonda une grande famille en Amérique investie dans la Tora et les Mitsvoth et pour la petite histoire ces derniers mois, en Erets, une petite-fille de Ya’akov s’est mariée avec un petit fils du rav Ehrlich zatsal (à ma connaissance, il est devenu un compositeur de musique juive et c’est lui qui a inspiré la chant « Ya’akov » d’Avraham Fried).

Chabbath Chalom et à la semaine prochaine, si D’ le veut.

David Gold : tél : 00972 55 677 87 47, e-mail : dbgo.36@gmail.com

Une bénédiction de bonne santé et de refoua cheléma à Avraham ben Dvora (Charles Kossmann)

Une bénédiction de réussite à Gabriel Lelti Néro Yaïr et de toute sa famille (Villeurbanne)

Une berakha à mon Roch Collel, rav Acher Bénédict-Brakha chlita et à son épouse dans tout ce qu’ils entreprennent dans le développement de la Tora en Erets (Bené Brak/Raanana)

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