Chute de Bashar el-Assad en Syrie : réactions en Israël et à l’international

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Le Kremlin a affirmé dimanche qu’el-Assad avait « démissionné de son poste » et quitté la Syrie

Ami’haï Chikli, ministre des Affaires de la Diaspora et membre du parti Likoud au pouvoir, a déclaré dimanche qu’Israël devrait reprendre la zone tampon avec la Syrie qui avait été établie en 1974, mettant en garde contre les conséquences de la chute du régime du dictateur syrien Bashar el-Assad. « Les événements en Syrie ne sont en rien une raison de se réjouir », a écrit Chikli sur le réseau social X, affirmant que les forces rebelles islamistes ont été rebaptisées et que « la majeure partie de la Syrie est en fin de compte contrôlée par des filiales d’Al-Qaïda et de l’État islamique ». La bonne nouvelle, selon lui, est « le renforcement des Kurdes et l’expansion de leur pouvoir dans le nord-est du pays [région de Deir Ezzor] ». Mais d’après un communiqué publié dimanche matin, mais daté de samedi, sur le compte X du ministère de la Défense du gouvernement syrien de transition et cité par l’agence Reuters, ces rebelles syriens indiquent avoir lancé une attaque contre les forces kurdes dans la ville de Manbij, au nord de la Syrie – leur alliance semblant avoir été de courte durée. Chikli a affirmé qu’Israël devrait reprendre le contrôle du mont Hermon et établir une nouvelle frontière défensive sur la base de la ligne de désengagement de 1974, ajoutant que « nous ne devons pas laisser les djihadistes se retrancher à proximité de nos communautés ».

Un drapeau syrien flottant dans la ville de Qouneitra, surplombant le côté israélien du plateau du Golan, le 30 juillet 2024. (Crédit : Louaï Beshara/AFP)

Le chef de l’opposition israélienne, Yaïr Lapid, a lui déclaré qu’il était « plus important que jamais de créer une coalition régionale forte, avec l’Arabie saoudite et les pays signataires des Accords d’Abraham, pour faire face ensemble à l’instabilité régionale ».

Les pays qui ont signé l’accord de normalisation des Accords d’Abraham avec Israël sont les Émirats arabes unis, Bahreïn et le Maroc.
Lapid a également déclaré que « l’axe iranien a été considérablement affaibli et qu’Israël devrait s’efforcer d’obtenir un résultat diplomatique global » qui l’aiderait également à relever les défis à Gaza et en Cisjordanie.

Le parti islamiste israélien Raam et la branche sud du Mouvement islamique, qui lui est affiliée, ont publié une déclaration saluant l’effondrement du « régime dictatorial » d’Assad, qu’ils qualifient de « tournant historique dans le parcours du peuple syrien ».

La déclaration indique que la nation syrienne a fait d’immenses sacrifices pour restaurer son honneur après avoir vécu « pendant des décennies sous un régime tyrannique qui servait d’outil de persécution, de meurtre, de déportation et de violation des droits de l’homme ».

Raam a ajouté que cette évolution constituait une lueur d’espoir pour les millions de réfugiés syriens dans le monde, qui pourront retourner dans leur pays et contribuer à « construire une nouvelle Syrie qui mettra en avant les valeurs de liberté et de respect de l’homme ».

Le ministre de l’Éducation, Yoav Kisch, a déclaré que compte tenu de l’incertitude stratégique créée par la chute du régime Assad en Syrie, il demandait à la Cour de Jérusalem de reconsidérer sa décision d’entamer mardi le témoignage du Premier ministre Benjamin Netanyahou dans le cadre de son procès pour corruption. Kisch a estimé sur X que le témoignage du Premier ministre devrait être retardé de trois mois, ajoutant que « compte tenu des changements spectaculaires, insister pour tenir l’audience à ce moment serait une erreur et ne serait pas pratique ».

Le ministre des Affaires étrangères, Gideon Saar, a aussi demandé le report du témoignage de Netanyahou dans son procès pénal, expliquant à la procureure générale Gali Beharav-Miara que la demande du Premier ministre était « raisonnable » compte tenu des récents événements survenus aux frontières d’Israël. « En tant que participant aux réunions du cabinet, vous connaissez la situation en matière de sécurité, y compris les récents développements dramatiques en Syrie », a écrit Saar. « En ce moment, une lourde responsabilité repose sur le gouvernement et plus encore sur le Premier ministre. L’intérêt de l’État est d’en tenir compte et de permettre un fonctionnement optimal pour le bien de l’État et de sa sécurité. » Netanyahou doit se présenter à la barre mardi, après que le tribunal de Jérusalem a rejeté sa demande de témoigner deux jours par semaine au lieu de trois, en raison des guerres en cours.

Le chef du parti HaMa’hané HaMamlakhti, Benny Gantz, a déclaré qu’il était temps de libérer le Liban et la Syrie de l’Iran, maintenant que Téhéran a été affaibli par quatorze mois de guerre contre lui et ses mandataires. S’adressant aux journalistes aux côtés du président du Conseil régional, Uri Kellner, depuis le plateau du Golan, le long de la frontière syrienne, Gantz a déclaré que la chute du régime du clan Assad en Syrie marquait un « tournant stratégique pour l’ensemble du Moyen-Orient ». Israël a longtemps préparé des infrastructures défensives dans le nord contre la menace militaire syrienne et doit maintenant « renforcer la défense des communautés elles-mêmes et de la zone-tampon, et surveiller l’évolution de la situation », a affirmé Gantz.
« Mais ce qui est tout aussi important, c’est que nous devons regarder au-delà de la Syrie. L’Iran n’est plus un soutien fiable [des mandataires régionaux], le Hezbollah a été gravement endommagé et l’influence [de l’Iran] s’est affaiblie tant au Liban qu’en Syrie. Nous devons continuer à faire pression sur lui et sur les acteurs locaux en Syrie et au Liban pour qu’ils se libèrent du joug iranien », a poursuivi Gantz, ajoutant « qu’à long-terme, il sera possible d’étendre les Accords d’Abraham afin d’établir une zone tampon contre l’Iran ». Les Accords d’Abraham sont une série d’accords de normalisation entre Israël et les pays arabes de la région. Des efforts sont déployés depuis longtemps pour que l’Arabie saoudite y adhère également.

Un fonctionnaire israélien a déclaré au Times of Israel qu’il était trop tôt pour dire exactement ce que ce développement dramatique signifiait pour l’État juif. « Pour l’instant, le régime iranien a été considérablement affaibli », a déclaré le fonctionnaire. « Mais de nombreux rebelles sont fondamentalement des membres d’Al-Qaïda. » « Les événements historiques sont une réaction en chaîne au pilonnage du Hamas, à la destruction du Hezbollah et, surtout, au ciblage de [Hassan] Nasrallah et à l’exposition de la vulnérabilité de l’Iran », a déclaré un deuxième fonctionnaire, du bureau du Premier ministre. « Israël veut la paix avec tous ceux qui veulent vraiment la paix avec Israël. » Pour l’instant, Israël essaie de limiter son implication afin de pouvoir se concentrer sur l’Iran, a expliqué le premier responsable.

Netanyahou a lui revendiqué le mérite d’avoir déclenché la série d’événements qui ont conduit à la chute du régime Assad en Syrie. « C’est un jour historique dans l’histoire du Moyen-Orient », a-t-il déclaré lors d’une visite au mont Bental, à la frontière israélo-syrienne. « Le régime d’Assad est un maillon central de l’axe du mal iranien – ce régime est tombé. » « C’est le résultat direct des coups que nous avons infligés à l’Iran et au Hezbollah, les principaux soutiens du régime d’Assad », a affirmé Netanyahu, faisant référence aux quatorze mois de combat contre l’Iran, le Hamas, le Hezbollah et d’autres mandataires iraniens depuis le 7 octobre 2023. « Cela a créé une réaction en chaîne dans tout le Moyen-Orient de tous ceux qui veulent se libérer de ce régime oppressif et tyrannique », a-t-il ajouté. Netanyahou a toutefois prévenu qu’en plus des nouvelles opportunités, la fuite d’Assad de Syrie comportait également des risques. « Notre priorité absolue est de protéger notre frontière », a affirmé le Premier ministre. « Cette région est contrôlée depuis près de 50 ans par une zone-tampon convenue en 1974, l’accord de séparation des forces. Cet accord s’est effondré et les soldats syriens ont abandonné leurs positions. »

Netanyahou et le ministre de la Défense, Israël Katz, ont donné l’ordre à l’armée israélienne de s’emparer de la zone-tampon samedi, a-t-il indiqué, ajoutant qu’Israël ne permettrait à aucune force hostile de s’installer à la frontière.

Netanyahou a rappelé la politique de « bon voisinage » menée par Israël au plus fort de la guerre civile syrienne, affirmant qu’Israël poursuivrait une politique similaire d’aide humanitaire aux civils syriens tout en évitant de prendre une part active dans les conflits internes. « Des centaines d’enfants syriens sont nés ici, en Israël », a-t-il rappelé. Netanyahou a souligné qu’Israël tendait également la main pour faire la paix aux Druzes, aux Kurdes, aux chrétiens et aux musulmans de Syrie.

La chute du régime Assad en Syrie a porté « un coup sévère à l’axe du mal iranien », a déclaré de son côté Katz. « Les tentacules de la pieuvre sont coupées un par un », a-t-il affirmé, faisant référence à l’influence de l’Iran sur le Moyen-Orient par l’intermédiaire de groupes mandataires, dont le Hezbollah au Liban et le Hamas à Gaza. S’engageant à ce que les communautés du plateau du Golan israélien restent en sécurité face à l’évolution de la situation en Syrie, Katz a déclaré qu’Israël était « déterminé à ne pas permettre un retour à la situation du 6 octobre [2023], que ce soit sur le plateau du Golan ou ailleurs ».

À l’international

Le Kremlin a indiqué dimanche qu’al-Assad avait « démissionné de son poste » et quitté la Syrie, après l’offensive fulgurante de groupes rebelles menés par des islamistes radicaux qui a mis son armée en déroute. « Suite aux négociations entre Bachar al-Assad avec un certain nombre de participants au conflit armé sur le territoire de la Syrie, il a décidé de démissionner de son poste présidentiel et a quitté le pays en donnant l’instruction de procéder au transfert du pouvoir de manière pacifique », a déclaré aux journalistes le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Moammar al-Eryani, ministre de l’Information du gouvernement internationalement reconnu du Yémen, a déclaré que le « projet expansionniste de l’Iran, qui a utilisé des milices sectaires comme outils pour compléter le Croissant perse, semer le chaos et saper la souveraineté des États, est en train de s’effondrer », alors que des groupes rebelles se sont emparés de la capitale syrienne, Damas. Il a également exprimé l’espoir que les Yéménites chassent les Houthis, un groupe terroriste aussi soutenu par l’Iran, qui s’est emparé de la capitale, Sanaa, et d’une grande partie du nord du pays en 2014. « Grâce à leur sagesse et à leur fermeté, les Yéménites sont capables de déjouer les plans de l’Iran et de son outil Houthi visant à violer leur terre et à altérer leur destin, tout comme ces plans ont échoué en Syrie et au Liban », a-t-il écrit sur X.

La politique de l’Iran à l’égard de la Syrie est susceptible d’évoluer, a mis en garde dimanche la diplomatie iranienne. L’Iran « adoptera une approche et des positions appropriées » en fonction « de l’évolution en Syrie et dans la région, ainsi que du comportement des acteurs » sur le terrain, a affirmé dans un communiqué le ministère iranien des Affaires étrangères.

« L’Irak affirme la nécessité de respecter la volonté de tous les Syriens et souligne que la sécurité, l’intégrité territoriale et l’indépendance de la Syrie sont d’une importance capitale », a déclaré le porte-parole du gouvernement, Bassim Alawadi, dans un communiqué.

« La Jordanie se tient aux côtés de ses frères syriens et respecte leur volonté et leurs choix », a indiqué le cabinet royal jordanien dans un communiqué, soulignant « la nécessité de préserver la sécurité de la Syrie, de ses citoyens et des acquis de son peuple, et d’œuvrer avec diligence et rapidité pour imposer la stabilité et éviter tout conflit qui conduirait au chaos ».

Dans un communiqué publié par le ministère des Affaires étrangères, l’Egypte a exhorté toutes les parties syriennes à « unifier leurs objectifs et leurs priorités et à lancer un processus politique pour une nouvelle phase de consensus national et de paix intérieure ». Elle déclare être déterminée « à travailler avec ses partenaires régionaux et internationaux pour mettre fin aux souffrances du peuple syrien, faciliter les efforts de reconstruction et soutenir le retour en toute sécurité des réfugiés dans leur pays d’origine. Le ministère égyptien assure se tenir « aux côtés de l’Etat et du peuple syriens et les soutenir dans la préservation de la souveraineté, de l’unité et de l’intégrité territoriale de la Syrie ».

Le Qatar a déclaré dimanche qu’il fallait empêcher la Syrie de « sombrer dans le chaos ». Ce pays du Golfe a déclaré qu’il « suivait de près les développements en Syrie » et souligné « la nécessité de préserver les institutions nationales et l’unité de l’Etat pour l’empêcher de sombrer dans le chaos », selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères. Le Qatar, qui avait soutenu les manifestants descendus dans la rue en 2011 contre le gouvernement syrien, est resté critique de Damas et n’a pas renoué avec lui comme l’ont fait plusieurs pays arabes en 2023. Le ministère des Affaires étrangères du Qatar a appelé, dans son communiqué, « toutes les parties à engager le dialogue pour préserver la vie des citoyens », tout en exprimant le « soutien inébranlable du Qatar au peuple syrien et à ses choix ».

Les talibans ont « félicité » dimanche le peuple et les rebelles syriens, disant espérer « une transition du pouvoir menée selon les aspirations du peuple syrien » et la fin des ingérences étrangères. « Nous exprimons l’espoir que le processus de transition du pouvoir sera mené selon les aspirations du peuple syrien, ouvrant la voie à un gouvernement indépendant, servant (le peuple) et islamique », a indiqué le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. « Nous encourageons l’adoption d’une politique étrangère constructive, permettant à la Syrie d’avancer sans ingérence extérieure ».

« Le régime d’Assad s’est effondré et le (pouvoir) dans le pays a changé de mains », a déclaré le chef de la diplomatie turque Hakan Fidan devant le Forum de Doha, qui se tient au Qatar. « Bien entendu, cela ne s’est pas produit du jour au lendemain. Cela fait 13 ans que le pays est dans la tourmente », a-t-il ajouté. « Nous devons être vigilants pendant cette période de transition. Nous communiquons avec les groupes pour nous assurer que les organisations terroristes, en particulier Daech (acronyme arabe de l’EI) et le PKK ne profitent pas de la situation », a déclaré Fidan.

Pékin « suit de près l’évolution de la situation en Syrie et espère que la Syrie retrouvera la stabilité dès que possible », a écrit le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué.

« La fin de la dictature d’Assad est un développement positif et attendu depuis longtemps. Cela montre également la faiblesse des soutiens d’Assad, la Russie et l’Iran », a déclaré la nouvelle cheffe de la diplomatie de l’UE Kaja Kallas dans un message publié sur X.

« La fin d’Assad représente pour des millions de personnes en Syrie un premier grand soulagement », a affirmé dimanche la cheffe de la diplomatie allemande, tout en mettant en garde contre l’arrivée d’autres radicaux dans le pays. « Le pays ne doit pas maintenant tomber entre les mains d’autres radicaux, quelle que soit la forme qu’ils prennent. Nous appelons donc les parties à assumer leurs responsabilités envers tous les Syriens », a ajouté dans un communiqué Annalena Baerbock.

Le chancelier allemand Olaf Scholz a qualifié dimanche de « bonne nouvelle » la fin du régime de Bachar al-Assad en Syrie, tout en appelant à la protection de tous les groupes religieux et minorités du pays et à une solution « politique ». « Bachar al-Assad a opprimé son propre peuple de manière brutale, il a d’innombrables vies sur la conscience et a poussé de nombreuses personnes à fuir la Syrie, dont beaucoup sont arrivées en Allemagne », a réagi le chef du gouvernement allemand dans un communiqué.

La France « salue la chute du régime de Bachar al-Assad » après « plus de 13 ans d’une répression d’une grande violence contre son propre peuple », a réagi dimanche le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Christophe Lemoine. Paris « appelle tous les Syriens à l’unité, à la réconciliation, et à rejeter toute forme d’extrémisme », poursuit-il dans un communiqué.

Londres a salué dimanche la chute d’un « régime barbare » en Syrie, et appelé au « rétablissement de la paix et de la stabilité ». « Le peuple syrien souffre depuis trop longtemps du régime barbare d’Assad et nous saluons son départ. Notre priorité est désormais de garantir qu’une solution politique prévale et que la paix et la stabilité soient rétablies » a déclaré le Premier ministre Keir Starmer dans un communiqué.

Le Premier ministre irlandais Simon Harris a insisté dimanche sur « la protection des vies civiles » et la tenue d’élections « libres ». « Dans les jours, les semaines et les mois à venir, la protection des vies civiles et des infrastructures ainsi que le respect du droit international doivent être primordiaux », a déclaré le Premier ministre dans un communiqué. (…) L’avenir de la Syrie doit être déterminé par les Syriens à travers une transition pacifique et des élections libres et équitables », a ajouté le Premier ministre.

L’Ukraine a salué dimanche la chute d’al-Assad en Syrie, affirmant que les dictatures qui ont parié sur le président russe Vladimir Poutine sont vouées à la même fin, tout en soutenant « le peuple syrien », a déclaré le ministre des Affaires étrangères, Andriï Sybiga, sur X. « Assad est tombé. Il en a toujours été ainsi et il en sera toujours ainsi pour les dictateurs qui misent sur (le dirigeant russe Vladimir) Poutine. Il trahit toujours ceux qui comptent sur lui », a affirmé le chef de la diplomatie ukrainienne, ajoutant que Kiev souhaitait « ouvrir la voie au rétablissement des relations (avec la Syrie, ndlr) à l’avenir ».

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