Depuis la Seconde Guerre mondiale, Amsterdam a profondément changé, mais certaines inquiétudes resurgissent, rappelant une période sombre. Si, pendant l’Occupation, la police néerlandaise obéissait aux ordres allemands pour traquer les Juifs, aujourd’hui ce sont les descendants d’immigrés marocains qui, dans certains cas, perpétuent cette chasse. Récemment, des violences attribuées à de jeunes hommes en scooter, majoritairement d’origine marocaine, ont visé des supporters israéliens venus pour un match de football entre le Maccabi Tel Aviv et l’Ajax Amsterdam.
Amsterdam, qui abrite environ 920 000 habitants, compte aujourd’hui environ 90 000 musulmans, principalement d’origine marocaine et turque, soit environ 10 % de sa population. Beaucoup de ces familles sont arrivées lors de la période de reconstruction après la guerre, les hommes ayant été embauchés comme travailleurs immigrés dans les années 1960. Aujourd’hui, leurs enfants et petits-enfants sont imprégnés d’une identité hybride et de tensions parfois amplifiées par les débats sur le Moyen-Orient.
Depuis des décennies, la société néerlandaise s’efforce de maintenir une tolérance mutuelle envers la diversité religieuse. Cette approche, qui remonte au XVIe siècle, privilégie une attitude d’« indifférence bienveillante » envers les différences culturelles. Mais ce modèle, qui avait permis aux réfugiés juifs portugais de s’établir dans la ville et de prospérer, est aujourd’hui remis en question par l’intensification des tensions entre certains groupes musulmans et la communauté juive.
Pour une partie des jeunes descendants de la première génération d’immigrés marocains, les Juifs d’Amsterdam sont assimilés aux actions d’Israël, qu’ils considèrent comme oppresseur dans le conflit avec Gaza. Bien que les conflits intercommunautaires aient fait des millions de morts dans le monde musulman depuis 1945, c’est la question de Gaza, où les pertes humaines sont causées par une armée israélienne, qui cristallise les ressentiments de ces jeunes.
Vendredi, lors d’une conférence de presse, la maire d’Amsterdam, Femke Halsema, a évité tout lien entre ces violences et l’origine ou la religion des agresseurs, évoquant seulement des « jeunes en scooter ». Pourtant, cette omission masque la réalité de tensions à la fois culturelles et religieuses au sein de la communauté musulmane d’Amsterdam, où certains ressentent une « humiliation collective » liée à leur histoire migratoire et à leur statut perçu dans la société néerlandaise.
L’attaque de vendredi dernier marque un tournant. Alors que des voix minoritaires, comme celle du populiste Geert Wilders, dénoncent les dangers de l’immigration musulmane de masse, les autres leaders politiques néerlandais demeurent silencieux ou prudents dans leurs déclarations. Pim Fortuyn et Theo van Gogh, deux Néerlandais ayant critiqué ouvertement cette immigration, furent assassinés en 2002 et 2004 respectivement, rappelant la violence que peut susciter ce débat.
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